DOCPOINT 31 janvier – 5 février 2023 XXIIe édition du Festival du film documentaire de Helsinki – DOCPOINT
Fondé en 2001, DocPoint est l’un des plus grands festivals du film documentaire des pays nordiques. A l’occasion de sa XXIIe édition, le Festival du film documentaire de Helsinki –DocPoint se déroulera du 31 janvier au 5 février 2023. Le Festival diffusera une large sélection nationale et internationale de films documentaires classiques et en exclusivité.
Au nombre des 85 films présentés au cours de cette XXIIe édition du Festival, quelques longs métrages français :
FASHION BABYLON Gianluca Materrese France (2022), 87 min Langue : français / anglais (sous-titres anglais)
LA DERNIÈRE SÉANCE / THE LAST CHAPTER Gianluca Materrese Italie / France (2021), 100 min Langue : français (sous-titres anglais)
DE HUMANI CORPORIS FABRICA Verena Paravel, Lucien Castaing-Taylor Pernet France (2022), 118 min Langue : français (sous-titres anglais)
GARÇONNIÈRES/ MAN CAVES Céline Pernet Suisse (2022), 90 min Langue : français (sous-titres anglais)
QUAND LA NUIT SE SOULÈVE/ IN THE BILLOWING NIGHT Erika Etangsalé La Réunion / France (2021), 71 min Langue : français (sous-titres anglais)
ULTRAVIOLETTE ET LE GANG DES CRACHEUSES DE SANG ULTRAVIOLETTE AND THE BLOOD-SPITTERS GANG Robin Hunzinger France (2021), 74 min Langue : français (sous-titres : anglais)
Les films français en programmation pour la saison hiver 2022-2023
Bibliothèque Oodi / Keskustakirjasto Oodi Töölönlahdenkatu 4 – Helsinki
KINO REGINA – 251 places face à un écran géant de 11 mètres – a réouvert ses portes dans l’enceinte de la bibliothèque OODI, élue meilleure bibliothèque au monde en 2019. La cinémathèque offre en cette fin d’année 2022 et début 2023 une programmation riche de films aux registres variés, dont une sélection des meilleurs films français.
KINO REGINA continue de rendre hommage cet hiver au scénariste et réalisateur français Jean Renoir, considéré à la veille de la Seconde Guerre mondiale comme l’un des plus grands cinéastes français, avec neuf films supplémentaires (qui font suite à la dizaine déjà programmés cet automne), dont quatre en langue anglaise réalisés à Hollywood du fait de son exil aux Etats-Unis pendant la guerre.
RÉTROSPECTIVE JEAN RENOIR
LA RÈGLE DU JEU / PELIN SÄÄNNÖT France (1939), 107 min Le 02.12. à 17 h 00 Le 04.12. à 15 h 30
THIS LAND IS MINE / TÄMÄ MAA ON MINUN Etats-Unis (1943), 103 min Le 06.12. à 13 h 00 Le 09.12. à 17 h 00
THE SOUTHERNER / ETELÄN MIES Etats-Unis (1945), 91 min Le 13.12. à 18 h 50 Le 17.12. à 14 h 00
THE DIARY OF A CHAMBERMAID / KOTIAPULAISEN PÄIVÄKIRJA Etats-Unis (1946), 86 min Le 19.12. à 17 h 00 Le 23.12. à 15 h 00
THE RIVER / JOKI Inde / Etats-Unis (1951), 98 min Le 27.12. à 19 h 00 Le 30.12. à 17 h 00
LE CARROSSE D’OR / KULTAISET VAUNUT France / Italie (1952), 98 min Le 02.01. à 17 h 00 Le 06.01. à 13 h 00
FRENCH CANCAN / RANSKALAINEN CANCAN France / Italie (1954), 102 min Le 10.01. à 17 h 00 Le 13.01. à 19 h 00
ELENA ET LES HOMMES / ELENA JA MIEHET France / Italie (1956), 87 min Le 17.01. à 19 h 10
LE DÉJEUNER SUR L’HERBE / AAMIAINEN RUOHIKOLLA France (1959), 92 min Le 24.01. à 19 h 00 Le 28.01. à 14 h 00
________________________________________________________________ À NE PAS MANQUER ÉGALEMENT :
MURIEL, OU LE TEMPS D’UN RETOUR Alain Resnais France / Italie (1963), 112 min Le 19.12. à 20 h 50 Le 10.02. à 16 h 45
L’ARMÉE DES OMBRES / TUNTEMATTOMAT SANKARIT Jean-Pierre Melville France / Italie (1969), 145 min Le 20.01. à 19 h 30 Le 21.01. à 18 h 30
VIVRE SA VIE / ELÄÄ ELÄMÄÄNSÄ Jean-Luc Godard France (1962), 82 min Le 31.01. à 17 h 00
L’IMPORTANT C’EST D’AIMER / TÄRKEINTÄ ON RAKASTAA Andrzej Zulawski France / Italie / Royaume-Uni (1974), 110 min
COSMOS Andrzej Zulawski France / Portugal (2015), 103 min Le 08.02. à 19 h 40 Le 12.02. à 17 h 15
Film de Bertrand Bonello (2013), 2 h 24 Avec Gaspard Ulliel (Yves Saint Laurent), Jérémie Renier (Pierre Bergé), Louis Garrel (Jacques de Bascher), Léa Seydoux (Loulou de la Falaise) Hommage à Gaspard Ulliel, tragiquement disparu le 19 janvier 2022 à l’âge de 37 ans.
Revoir le film sur arte.tv jusqu’au 22 novembre 2022
Rediffusion du film le 1er décembre 2022 à 23 h 55 (France) / 00 h 55 (Finlande)
A cette occasion, lire ou relire l’entretien accordé par Bertrand Bonello au Festival du film du soleil de minuit en juin 2017.
Entretien avec Bertrand Bonello
Bertrand Bonello, réalisateur et scénariste français, était l’un des invités d’honneur du Festival du film du soleil de minuit dont la 32e édition s’est déroulée, cette année, du 14 au 18 juin 2017 à Sodankylä, en plein coeur de la Laponie finlandaise. Il est l’auteur d’une douzaine de films dont sept longs métrages mais il est surtout connu pour avoir signé la réalisation de « L’Apollonide – souvenirs de la maison close » (2011), « Saint Laurent » (2014) et « Nocturama » (2016). Musicien de formation, il compose également les bandes originales de pratiquement tous ses films. Bertrand Bonello est l’un des représentants talentueux de la nouvelle génération du cinéma d’auteur français.
Vous êtes sans doute pour la première fois en Finlande, tout au moins au Festival du soleil de minuit. Qu’est-ce qui vous a décidé à venir à ce festival ? Que connaissez-vous du cinéma finlandais, et plus particulièrement celui d’Aki Kaurismäki ? En fait, ce qui m’a décidé c’est que j’entends parler de ce festival depuis longtemps, que je croise souvent des gens qui y sont allés, des réalisateurs, des amis… et tout le monde avait l’air de me parler de quelque chose d’assez extraordinaire. Donc, quand le directeur du Festival m’a invité pour être invité d’honneur, j’ai tout de suite accepté parce que j’avais envie d’y aller voir de plus près. Mais c’est un festival qui a une très bonne réputation chez les cinéastes, par exemple. Quant au cinéma finlandais, forcément on connaît un peu que le cinéma des Kaurismäki, un peu plus surtout Aki, mais aussi Mika dans les années 90 dont j’allais voir les films qui sortaient à Paris à cette époque-là. Le reste, c’est sûr qu’on connaît moins… à part, bien évidemment, le film récent « Olli Mäki » de Juho Kuosmanen [Prix « Un certain regard », Cannes 2016 – N.D.L.R.]. Y a-t-il un film d’Aki Kaurismäki qui aurait votre préférence ? C’est sûr que, pour ce qui me concerne, j’ai découvert ses films à la fin des années 80. Donc, ce sont un peu ses premiers films qui m’ont le plus plu, après j’étais peut-être trop habitué. « La fille aux allumettes », par exemple… enfin, toute cette période-là. J’aime beaucoup les « Leningrad Cowboys » et aussi les films avec Jean-Pierre Léaud. C’est tous ces films de cette époque-là que j’aime. Mais je crois que peut-être « La fille aux allumettes » est plus mon préféré.
Vous avez plutôt une formation de musicien. A quel moment s’est opérée la bifurcation vers le cinéma et quelles en ont été les raisons ? Les raisons, elles étaient que je m’ennuyais un peu dans la musique en France. C’était la fin des années 80/début 90. Je ne connaissais pas très bien le cinéma, mais je me disais que ce serait un territoire intéressant à occuper. J’avais gagné pas mal d’argent avec la musique et je me suis payé un court métrage qui a été, en fait, mon apprentissage, mon école. Et à partir du moment où je me suis mis à préparer ce film, j’ai vraiment commencé à m’intéresser au cinéma, à voir beaucoup de films. Et puis, après, c’est devenu vraiment une drogue.
Quels sont les cinéastes qui vous ont nourri, qui vous ont le plus marqué ? Je n’ai pas du tout un apprentissage du cinéma scolaire, mais je pense, en effet, que peut-être le premier qui m’a parlé très personnellement, c’était Jarmusch. C’est pour ça que je connais bien les films d’Aki Kaurismäki parce que ça se parle, en fait. Après, en connaissant Jarmusch, j’ai vu qu’il parlait beaucoup de Wenders, puis Wenders parlait beaucoup d’Antonioni, puis après on s’intéresse à l’Italie, ensuite Pasolini parle de Chaplin, de Dreyer, et voilà. Ce sont des espèces de trajets personnels, en fait, au sein de l’histoire du cinéma et c’est ainsi que, régulièrement, on découvre des cinéastes qui vous inspirent. Mais je suis toujours intéressé de voir et de revoir des grands films, tout comme je m’intéresse à ce que peut faire, par exemple, un jeune cinéaste chinois aujourd’hui.
Comment expliquez-vous cette fascination quasi obsessionnelle pour Pasolini – à qui vous avez, du reste, consacré votre premier film documentaire « Qui je suis » ? Parfois, quand vous êtes dans la vingtaine, vous faites la rencontre de quelques personnes, quelques oeuvres qui, dans l’ensemble, vous transforment. Pour ce qui est de Pasolini, par ailleurs, ce n’est pas du tout le cinéaste, mais plutôt l’homme, le poète, l’écrivain qui m’a fasciné, cette espèce de pensée ultra-intelligente et ultra-poétique, et le mélange des deux. Donc voilà, ça fait partie de ces gens comme certains écrivains ou certains peintres qui, à un moment, quand vous les rencontrez, vous structurent. Est-ce que c’est ce côté sans foi, ni loi qui permettait à Pasolini d’aller aussi loin ? Il y a déjà l’époque, qui a quand même beaucoup changé. Et puis, intellectuellement, il est tellement puissant que cela lui a permis d’aller loin. On a l’impression que dans votre cinéma vous pourriez aussi aller un peu plus loin mais qu’il y a une certaine retenue. C’est le changement d’époque. C’est vrai qu’aujourd’hui, aller loin ce ne serait plus de cette manière-là, parce que ça a déjà été fait, parce que ça ne fonctionnerait plus. Par ailleurs, si Pasolini était encore vivant, il irait encore très loin, mais d’une autre manière.
Quand on est un cinéaste de talent comme vous, qu’on n’a pas fait d’école de cinéma, qu’on n’a pas de formation cinématographique particulière, quelles qualités indispensables doit-on réunir pour devenir un bon metteur en scène ou, du moins, s’essayer au métier ? La meilleure école, c’est de voir des films et de lire. Je lisais beaucoup les entretiens de cinéastes, par exemple. Ça me passionnait et ça me passionne toujours. Dans un entretien, même entre les lignes, en fait, on voit bien quelles sont les questions qu’un cinéaste a dû se poser et quelles sont les réponses qu’il a dû apporter à tel moment. On voit bien les cheminements des choses. Et un bon entretien de metteur en scène, ça vaut une année scolaire. C’est vrai que j’ai été beaucoup nourri par aussi la critique, les entretiens… et puis voir, voir des films.
Vous faites des films aux budgets très différents. Vous vous êtes fait, certes, rapidement un nom, mais comment on fait pour son deuxième long métrage, en l’occurrence « Le pornographe », pour persuader Jean-Pierre Léaud d’en tenir le rôle principal ? C’est passer par deux choses très simples. Premièrement, le scénario, et deuxièmement, une rencontre. Je l’ai appelé ; je lui ai déposé le scénario dans sa boîte. Il a aimé le scénario, puis on a passé quatre heures au café. Voilà, c’est aussi simple que ça. Et puis, Jean-Pierre, c’est quelqu’un qui a de toute manière une curiosité pour aussi les jeunes cinéastes – et, à l’époque, j’étais vraiment un jeune cinéaste. Je pense que les jeunes cinéastes qui ont un lien avec l’histoire du cinéma dans leur manière de parler, ça le rassure, il aime ça. Donc, ça s’est fait vraiment hyper simplement.
Pour ce qui est du film « Saint Laurent » qui n’aurait pas eu l’aval de Pierre Bergé, le compagnon du grand couturier, peut-on braver Pierre Bergé sans dommages sinon pour la réalisation du film du moins pour sa sortie ? Pour la réalisation du film, oui. Par ailleurs, j’ai même l’impression que ça m’a aidé, parce que ça m’a poussé à être vraiment plus libre, à ne pas l’avoir sur le dos. Après, pour la sortie voire le financement, c’est certain que le film, même s’il a coûté beaucoup d’argent, à l’origine coûtait plus et que, de par ses réseaux, son pouvoir, il a bloqué des financements. Mais bon, voilà. Là où je dis que c’est peut-être pas plus mal pour la réalisation, c’est que, parfois, c’est dans les contraintes qu’on est obligé de trouver des idées, d’être plus inventif. Disons que c’est un bon ennemi. Il vous a tout de même bloqué l’accès aux robes de la collection. Encore une fois, c’est un mal pour un bien parce que si on regarde l’autre film [« Yves Saint Laurent » (2014) de Jalil Lespert – N.D.L.R.] que Pierre Bergé a validé… conduit, en fait, on se rend compte que, certes, ils ont accès aux robes, mais ces robes-là sont tellement des pièces de musée. D’abord, on n’en voit pas tant que ça et, en plus, je sais que sur le tournage, il fallait que les mannequins soient habillées par des femmes en gants blancs, etc. En fait, ce sont des oeuvres de musée et ce n’est pas vivant. Alors que, pour ce qui est de mon film, « Saint Laurent » est censé se passer en 1976, et on ne sacralise pas le tissu. Donc, le fait d’avoir dû tout reproduire nous a permis aussi une liberté. Le tissu était froissé, il vivait quand il tournait, mais dans l’autre film on sent que c’est corseté par le côté musée, en fait. [L’ironie a voulu que des deux films sur Yves Saint Laurent, en lice pour les César 2015, c’est celui de Bertrand Bonello qui a obtenu le César du meilleur costume – N.D.L.R.]
Vous avez visiblement dans vos films le souci du détail, de la précision. Tout semble tiré au cordeau. Vous êtes scénariste, réalisateur, monteur. Vous composez aussi, du moins en grande partie, la musique de vos films. Comment travaillez-vous en général avec les acteurs ? Est-ce que tout est écrit ou y a-t-il parfois une part d’improvisation ? Il n’y a pas d’improvisation. Je n’aime pas l’improvisation. Tout est écrit. Après, vous dire comment on travaille avec les acteurs : il y a, pour moi, autant de manières différentes que d’acteurs différents. Evidemment, on ne travaille pas de la même manière avec Jean-Pierre Léaud qu’avec un jeune dans « Nocturama » qui n’a jamais joué auparavant. Et même si je prends ces jeunes qui n’ont jamais joué, au nombre de dix dans le film, ils sont tous différents. Pour moi, le plus gros du travail, il est vraiment avant. C’est-à-dire passer du temps, parler, et pas sur les scènes, d’ailleurs. C’est d’amener les acteurs sur le plateau dans les meilleures conditions, dans le meilleur « mood », pour employer un mot anglais qui n’a, du reste, pas de traduction française. Et, à un moment, si le travail en amont est bien fait, globalement, la direction d’acteur se résume alors à des directives simples. Evidemment, avant le tournage, je demande aux acteurs s’il y a une scène qui leur pose question, un dialogue qu’ils ne sentent pas, des choses comme ça, et ça je le fais avec tous les acteurs quels qu’ils soient. Après, ils ne remettent pas vraiment grand-chose en cause. Il y en a certains qui font des propositions ; j’y réfléchis et, parfois, je leur donne raison.
Vous avez offert au public sept longs métrages sur une grande diversité de sujets. Comment vous viennent les idées de vos films, les inspirations ? Les puisez-vous forcément dans la réalité ? Je pense que c’est la question la plus compliquée dans le sens où on ne peut lui apporter vraiment aucune réponse. Comment vient une idée ? C’est bien là la question la plus mystérieuse. Pour ma part, il y a autant de lectures de livres que de journaux, de marches dans la rue que de rester dans mon salon à écouter de la musique, etc. Et puis après, parfois, il y a une idée qui vous vient, qui semble une évidence. Ensuite, il faut essayer d’accueillir cette idée, et c’est là que le travail commence. Mais cela reste très mystérieux. Il y a aussi des désirs. Par exemple, pour « L’Apollonide », une des naissances du film est venue d’une envie que j’avais de faire un film avec un groupe de filles. Ce n’est pas de l’inspiration, ce sont des envies. Sur « Nocturama », je sais que j’avais une vraie envie, celle de revenir au contemporain. Après, vous vous posez la question : qu’est-ce que le contemporain ? Et puis, sur cette réflexion de ce qu’est le contemporain, à un moment, on a tout d’un coup une sensation d’explosion. Et voilà, c’est un enchaînement. Mais c’est assez mystérieux, et c’est tant mieux.
De tous vos films, quel est celui qui a le plus compté pour vous, celui dans lequel vous vous êtes le plus investi ? Le plus investi ? Je dirais que c’est dans tous parce que, franchement, c’est tellement de travail. Même quand je fais un court métrage, et je continue à en faire, c’est, pour moi, aussi important qu’un long métrage. Donc, sur l’investissement, c’est vraiment égal. Le film qui a le plus compté, ça dépend pour quoi. C’est sûr qu’un film comme « Le pornographe », c’est celui qui m’a un peu révélé [Semaine de la critique/Prix FIPRESCI, Cannes 2001 – N.D.L.R.], et donc, il a compté. Puis, « L’Apollonide » m’a fait passer au niveau supérieur aussi en termes de notoriété [Compétition officielle, Cannes 2011 – N.D.L.R.], et donc, ça a compté aussi. Après, j’ai également beaucoup d’affection pour les films qui ne marchent pas. Donc, un film comme « De la guerre », qui a été assez rejeté à sa sortie, finalement il compte un peu plus pour moi que les autres parce qu’il a plus besoin d’être soutenu. Sinon, il y en a un pour lequel j’ai vraiment un faible, c’est un court métrage qui s’appelle « Cindy: The Doll is Mine », un film que j’ai fait il y a une dizaine d’années avec Asia Argento. Je dirais donc que, sur l’investissement, c’est vraiment pareil et après, j’ai forcément un peu plus d’affection pour les films mal aimés.
Que pensez-vous du cinéma français aujourd’hui ? Avec 234 films français produits en 2015, 221 en 2016, à capitaux majoritairement français, c’est un signe, à l’évidence, de la vitalité française et on pourrait se demander si les financements sont finalement si difficiles à obtenir en France. C’est franchement une question à laquelle on pourrait apporter une réponse de deux ou trois heures. C’est très complexe. Mais si je devais faire vite… D’abord, en effet, quand on regarde les chiffres, tout va bien. Par contre, quand on regarde les films, est-ce que tout va bien ? Ça, c’est autre chose. Il faut voir ce qui sort, aussi. Pareil, quand on regarde le nombre d’entrées en France, on vous dit que c’est la meilleure année depuis tel gros succès, mais quand on regarde les films qui font des entrées, c’est quand même des horreurs. C’est deux poids deux mesures, en fait. Donc, est-ce que le cinéma français va bien ? J’imagine que son économie fonctionne à peu près pour certains, mais elle est catastrophique pour d’autres. Les financements sont, contrairement à ce qu’on pense, de plus en plus difficiles pour un certain type de films et, de fait, les financements étant difficiles, le cinéma d’auteur se formate. Donc, est-ce que ça va bien ? Oui et non. C’est une réponse très complexe, en fait. Dans votre cas personnel, cela a-t-il été difficile d’obtenir des financements ? Et avez-vous aussi fait appel à des fonds européens comme Eurimages ? Bien sûr, on fait appel à tout ce qu’on peut. « Saint Laurent », c’est un cas particulier. Ça a été dur parce qu’il y avait deux films. Donc, à un moment, le marché français ne peut pas absorber à hauteur de 15 millions d’euros deux projets de cette envergure… Oui, ça a été dur parce que Pierre Bergé a envoyé des lettres à tous les financiers. C’est pour ça que c’est un cas un peu particulier. Sinon, comme j’ai commencé par des films à très petits budgets, mon approche, c’est un peu de demander combien il y a et de voir ce qu’on peut faire. On fait, donc, avec ce qu’il y a. Mais là, je pense que depuis un an et demi la situation s’est beaucoup durcie. On verra bien quand j’essaierai à nouveau de financer un film. C’est pour ça que, d’un côté, j’ai envie de dire que, oui, le cinéma français va très bien mais, par ailleurs, est-ce que les films vont très bien ?
Avec vos trois derniers films, « L’Apollonide », Saint Laurent », « Nocturama », vous décrivez à chaque fois la fin d’une époque, des mondes qui s’effondrent. Si on ne sait pas trop quel regard vous portez – entre admettre ou dénoncer –, on croit toutefois percevoir une certaine nostalgie pour un monde où soufflait un vent de liberté, d’insouciance, de fête. Avec ces trois films, vous traversez un siècle pour nous laisser à la fin de votre dernier film « Nocturama » au bord d’un gouffre. Reste à savoir maintenant si on n’a pas déjà commencé de basculer dedans (!?) Constat terrifiant. Qu’est-ce qu’il y aura après ? Diriez-vous avec Robert Bresson : « Le diable, probablement… » ? La réponse est dans la question. Mais c’est vrai, il y a un mélange de nostalgie et de mélancolie. L’idée du monde qui s’achève, de toute manière, elle est évidemment mélancolique, mais elle est assez belle. C’est pour que quelque chose redémarre. Pour ce qui est de la nostalgie, oui. Evidemment, je suis né en 1968 et donc, j’ai été jeune adulte, on va dire, au moment où le monde était vraiment en train de changer, c’est-à-dire à la fin des années 80. Pour moi, cette période est une rupture fondamentale dans le monde moderne, catastrophique certainement – enfin, ça on n’y peut rien –, mais vraiment fondamentale, une rupture de beaucoup de choses. Et ce n’est que depuis ces dix dernières années qu’on commence vraiment à s’en apercevoir. « Le diable, probablement… » ? Encore une fois pour mille raisons, comme une espèce de bulldozer un peu très compliqué à arrêter. Une chose qui m’effraie c’est que – et c’est compliqué de ne pas avoir l’air réactionnaire en disant ça, mais, en fait, je ne le suis pas –, j’ai l’impression qu’il y a une sorte de rupture avec la civilisation qui se met en place, quelque chose qui a été très construit pendant des siècles et des siècles et qui est en train de se déconstruire, de se défaire. Donc, il y aura certainement autre chose qui va renaître de ça, mais on n’en est pas encore là. Pour revenir à l’époque que vous mentionnez, c’était un moment beaucoup plus facile, le monde allait beaucoup mieux. L’insouciance dont vous parlez, elle n’est plus permise aujourd’hui, elle n’est plus acceptable. C’est vrai que, par exemple, si on prend ne serait-ce que les mouvements sociaux, quand vous avez en 1968 les gens qui descendent dans la rue, c’est pour avoir de la liberté, c’est pour les autres, c’est pour les Polonais, les Tchèques… Aujourd’hui, quand les gens descendent dans la rue, c’est pour eux parce qu’ils n’ont pas le choix. Donc, c’est quand même une vraie différence et on ne peut pas leur en vouloir.
Quels sont vos projets cinématographiques ? Vous disiez en janvier de cette année que vous ne saviez pas s’il y aurait un prochain film. Six mois plus tard, éprouvez-vous aujourd’hui la nécessité, l’envie de faire un nouveau film ? Et vers quoi pensez-vous vous tourner ? Je ne sais pas. Je prends des notes et, en même temps, je n’ai pas suffisamment de désir pour mettre une machine en route qui est quand même, disons-le, une montagne. C’est très long. Un film, c’est trois ans. Par ailleurs, je n’aime pas trop l’idée que le cinéma soit un métier. Il va, certes, arriver un moment où il va falloir que je travaille, mais, voilà, je n’ai jamais vraiment cherché, en fait, de sujet. Ce sont vraiment des évidences qui arrivent. Et là, pour l’instant, il n’y en a pas vraiment.
Quand vous ne tournez pas, continuez-vous à composer de la musique ? Vous savez, par exemple, j’ai fini la tournée promo de « Nocturama » il y a à peine un mois. Cela a duré 5/6 mois. C’était très long. On croit qu’entre les films on ne fait rien, mais on est très sollicité parce qu’on accompagne le film à l’étranger. En France, ça dure deux mois, mais après on accompagne le film dans les festivals, dans d’autres pays. Tout le monde parle des gros festivals, mais il y en a plein de petits, même ici. Donc, tout ça quand même prend du temps. Mais je fais toujours des petits projets. En l’occurrence, j’ai fait un court métrage ; je suis toujours attaché à cette idée de forme assez libre. J’ai accompagné aussi musicalement un couple de danseurs contemporains. Voilà, des petites choses comme ça. Mais vraiment l’accompagnement des films est de plus en plus long parce qu’il y a de plus en plus de supports informatiques, en fait, de sites Internet, de trucs comme ça. Il y a énormément de demandes. Et, évidemment, on ne peut pas tout faire, mais quand même il faut soutenir un peu les films. Donc, il faudrait une vraie idée pour relancer la machine. Une évidence, en fait. C’est ça… c’est plus des évidences. C’est ça et pas autre chose. Après, il y a des metteurs en scène qui travaillent sur plein de films en même temps. Une fois un film terminé, il faut qu’il y en ait un autre. Moi, je ne suis pas comme ça.
Propos recueillis par Aline Vannier-Sihvola Sodankylä, le 15 juin 2017
(Helsinki-syndrooma) Série créée par Miikko Oikkonen (Finlande, 2022 – 8 x 50 min, VF/VOSTF) – Sur ARTE, les 4 premiers épisodes, ce jeudi 17 novembre à partir de 22 h 25 (France) / 23 h 25 (Finlande) – Sur ARTE, les 4 épisodes suivants, le jeudi 24 novembre à partir de 23 h 10 (France) / 00 h 10 (Finlande) – Revoir en replay sur arte.tv jusqu’au 14 février 2023
À Helsinki, l’entrepreneur Elias Karo prend en otage quatre journalistes qu’il force à enquêter sur la faillite de la société de son père dans les années 1990. Un drame social sous tension qui interroge la défiance envers les institutions au cœur d’une Finlande en crise.
Arnaud Desplechin, invité d’honneur du Festival du film du soleil de minuit de Sodankylä (Laponie finlandaise) en 2019, revient une fois de plus sur le devant de la scène avec la diffusion sur ARTE de « Roubaix, une lumière », dont l’acteur Roschdy Zem dans le rôle du commissaire Daoud a été récompensé par le César du Meilleur acteur (2020) – ARTE – A l’antenne : lundi 17 octobre à 20 h 55(heure française) / à 21 h 55 (heure finlandaise) Revoir sur arte.tv jusqu’au 15 novembre 2022
« Roubaix, une lumière » (2019), de Arnaud Desplechin Un polar sur fond de drame social (survenu en 2002), inspiré d’un documentaire qui fit sensation à l’époque pour avoir recueilli en direct l’aveu d’un assassinat – avec Roschdy Zem, Léa Seydoux et Sara Forestier. Ce lundi 17 octobre sur ARTE à 20 h 55(heure française) / à 21 h 55 (heure finlandaise) Revoir sur arte.tv jusqu’au 15 novembre 2022
Une occasion de lire ou relire l’entretien accordé le 15 juin 2019, à l’époque en avant-première, par Arnaud Desplechin au Festival du soleil de minuit à propos de « Roubaix, une lumière » .
ENTRETIEN AVEC ARNAUD DESPLECHIN _____________________________________________
Arnaud Desplechin, metteur en scène français, était l’invité d’honneur de la XXXIVe édition du Festival du film du soleil de minuit. Auteur d’une douzaine de longs métrages, dont « La sentinelle », « Comment je me suis disputé… (ma vie sexuelle) », « Rois et reine », « Trois souvenirs de ma jeunesse »… ainsi que deux films tournés en langue anglaise « Esther Kahn » et « Jimmy P. », tous sélectionnés à diverses reprises dans les plus grands festivals de cinéma, Arnaud Desplechin est venu présenter cinq de ses films dont le tout dernier « Roubaix, une lumière », avec Léa Seydoux, Sara Forestier et Roschdy Zem, inspiré d’un fait divers se déroulant dans sa ville natale, avant même sa sortie en salles en France le 21 août et qui était en compétition officielle au 72e Festival de Cannes 2019.
Sans doute pour la première fois au Festival du film du soleil de minuit, quel regard portez-vous sur ce festival d’autant que vous arrivez quasi directement de Cannes et qu’après le marathon médiatique qui l’accompagne, c’est ici, tout au moins, un brusque changement d’exposition à la lumière ? Ce ne sont pas les mêmes projecteurs, en effet ! Je connaissais le Festival à travers le nom des frères Kaurismäki, bien sûr, car ce sont eux qui ont rendu le Festival notoire. Par ailleurs, j’ai une amie de l’école du cinéma, Pascale Ferran, qui était venue il y a longtemps présenter « Lady Chatterley » et « Petits arrangements avec les morts » au Midnight Sun Film Festival et elle m’avait dit qu’il fallait absolument que j’y aille. Depuis, j’ai été invité plusieurs fois mais, à chaque fois, ça tombait mal avec le planning, soit en même temps qu’un festival ou qu’une sortie de film, etc. et je ne pouvais pas. Et maintenant, je dois dire que j’ai été très ému quand Timo Malmi [directeur artistique du MSFF – NDLR] m’a écrit et qu’il m’a dit que ce serait une rétrospective. J’ai donc enfin pu venir et je suis très touché de pouvoir montrer mon nouveau film, en plus de cette rétrospective. Ce festival, c’est la cinéphilie comme je l’aime. Cannes – je fais un tout petit détour par Cannes –, c’est un endroit qui pour un réalisateur français n’est pas du tout agréable. Il y a des festivals agréables : Venise, c’est formidable, de même que le Festival de New York. Mais quand on va à Cannes, c’est très brutal dans les rapports. Pourtant, ça vaut le coup parce que c’est le seul festival où les acteurs sont à ce point-là accueillis par le public, avec les photographes. Il y a à Cannes une gratitude pour les acteurs. C’est donc pour moi une manière de dire merci aux acteurs après tout ce qu’ils m’ont donné. Mais, personnellement, c’est vraiment du travail tout le temps et ce n’est pas très agréable. Alors, tout d’un coup, c’est formidable d’arriver ici, après avoir été confronté à un public très agressif à Cannes, et de se retrouver avec un public, cinéphile ou populaire je ne sais, mais qui déjà voit des films et qui les voit très simplement. Ce sont des gens qui aiment le cinéma pour le cinéma, aussi simplement que ça. Et du coup, ça donne une ambiance formidable, sans hiérarchie, et avec ce phénomène invraisemblable : la nuit qui ne se couche jamais !
Que connaissez-vous et appréciez-vous du cinéma d’Aki Kaurismäki ? Le choc que j’ai eu et qui m’est resté pour le premier film que j’ai vu de lui, c’était « La fille aux allumettes ». C’est-à-dire qu’il y avait tout à la fois un dépouillement de l’image, un côté générationnel et une libération du cinéma. Pour moi, il y a deux réalisateurs que je rapproche totalement, ce sont Kaurismäki et Jarmusch. Tout d’un coup, ils ont inventé une douceur et une vitesse qui leur est absolument singulière ; il y a un rythme de récit qui n’appartient qu’à eux. Toutefois, l’art de Jarmusch ne ressemble pas à celui de Kaurismäki qui, lui, va creuser plus de douleur mais avec légèreté, avec une forme d’humour. L’art de Kaurismäki est un art très cinéphile et lié à la France : il y a des apparitions de Jean-Pierre Léaud dans « J’ai engagé un tueur à gages », après il a fait « La bohème », puis « Le Havre » que j’ai adoré. Et, donc, il arrive à faire jouer les acteurs français, mais avec une autre musique, et il arrive à imposer sa musique. Et ce qui m’a stupéfié avec Kaurismäki, et qui continue de me stupéfier de film en film, c’est qu’il a tenu ce rythme qui est tellement singulier, tellement unique, et puis il va creuser des douleurs, comme les cinéastes scandinaves, mais avec un humour burlesque qui n’appartient qu’à lui. Pour moi, Jarmusch et Kaurismäki ont inventé et reflété aussi une façon qu’on avait d’être au monde ; on était contemporain de leurs films. Je suis contemporain de Kaurismäki, et j’en suis très heureux. J’en ajouterai même un troisième : Kaurismäki, Jarmusch et Moretti. Ce serait mon trio gagnant. Ce sont trois cinéastes qu’on a découverts un peu en même temps, qui héritaient des rebellions et qui transformaient ça d’une manière un peu différente : l’héritage punk pour Jarmusch, l’héritage politique pour Moretti et un héritage esthétique, dont je ne sais d’où ça vient de Finlande, de Kaurismäki. Trois figures un peu rebelles que j’aime beaucoup.
Votre dernier film « Roubaix, une lumière » – que vous êtes venu ici nous présenter avant sa sortie en France le 21 août – était en compétition officielle au Festival de Cannes. Sur la douzaine de longs métrages présentés au fil des ans à Cannes, six se sont retrouvés en compétition. Vous vous retrouvez à faire ainsi concurrence à Almodóvar – autre habitué de Cannes –, lui-même pour la 6e fois en compétition à Cannes. Six fois nommé et pas primé, mais pas pour autant déprimé !? C’est marrant, j’y ai justement pensé cette année. Je me suis dit, vu que ce film-là est très différent de mes films précédents dans le sens où il est basé sur des faits réels alors que d’habitude je me base sur des fictions invraisemblables, je me demandais, donc, comment il allait être reçu. Et à la projection du film, cela a été un moment extrêmement émouvant ; la réception était assez bouleversante, avec une standing ovation très puissante. Et alors que j’en parlais avec Roschdy Zem – après avoir vu le film de Almodóvar que j’aime beaucoup –, je lui disais que c’était Banderas qui allait avoir le prix d’interprétation masculine et pas lui. Il y a une scène dans le film quand Banderas retrouve son ancien amant – ils se sont aimés il y a 20 ans et, là, ils en ont 60 – qui est tout simplement magnifique. Et alors que je disais ça à Roschdy, je pensais à mes films. Je me disais qu’en fait les choses étaient bien parce qu’il y avait des gens qui faisaient des films qui étaient plus universels – je prendrais, par exemple, des réalisateurs que j’admire beaucoup comme les frères Dardenne – et il y a des gens qui font des films singuliers, comme moi. Alors, donc, dans les festivals, c’est normal que les prix aillent aux films universels plutôt qu’aux films singuliers. Et est-ce que je voudrais faire des films universels ? Pas du tout. Je préfère faire des films singuliers.
Vos films ont souvent pour cadre Roubaix, votre ville natale mais, cette fois-ci, pour la première fois, vous vous inspirez d’un fait divers. Aucun de vos acteurs fétiches ne fait partie de la distribution, vous engagez même en grande partie des non-professionnels, vous vous détournez du milieu de la bourgeoisie pour vous attacher aux classes les plus défavorisées de la ville. Qu’est-ce qui a déterminé ce choix ? La maturité, je crois… En fait, il y a deux choses qui ont joué. L’une, c’est que je sortais d’un film « Les fantômes d’Ismaël » qui reprenait tous les thèmes de mes films précédents, qui était comme un feu d’artifice de fiction et, juste après le film, je me suis mis à penser faire un film où il n’y ait plus aucune fiction, faire le contraire. On fait toujours, comme disait Truffaut, un film contre le précédent. Alors, le tout était de faire le saut, le grand saut. Et il y a un film qui m’a aidé à faire ce saut, c’est le Hitchcock qu’aujourd’hui je préfère et qui est « The Wrong Man »/« Le faux coupable ». Le seul film de Hitchcock, alors que Hitchcock était le roi de la fantaisie, où, tout d’un coup, tout était vrai. C’est-à-dire qu’il a été jusqu’à prendre des gens qui rejouent leur propre rôle, à tourner sur les lieux mêmes du drame. Tout était authentique – il était obsédé par ça –, et je trouve le film infiniment personnel. Et je me suis dit que si Hitchcock, mon maître, l’avait fait, je pouvais m’y essayer un peu à ma façon. Et, quand je parlais de maturité, je pense qu’il y avait cette envie d’aller explorer ailleurs. Souvent, dans mes films, il y a eu des personnages africains ou nord-africains qui étaient médecins, psychanalystes ou professeurs mais qui étaient dans les marges des films. Or Roubaix est une ville qui n’est pas nord-africaine ; Roubaix est une ville algérienne. C’est vraiment une ville profondément algérienne et c’est une communauté que, moi qui suis né blanc et catholique, je n’ai jamais osé filmer, que je ne savais pas filmer. Par ailleurs, il y avait mon amitié de longue date avec Roschdy Zem à qui je ne savais pas offrir de rôle, je ne savais pas les écrire, et là j’ai pensé, en tombant sur ce fait divers, sur l’histoire de ce commissaire un peu mythique, faire le portrait de cet homme. Je crois que j’avais enfin la maturité pour arriver à m’identifier et à représenter sans clichés un personnage algérien comme ma ville a pu en connaître et comme j’ai pu en croiser. Il m’a fallu tout ce temps-là pour être capable de montrer, pas une famille bourgeoise, mais effectivement des gens qui sont des victimes sociales et avec ce but peut-être – et là, j’ai l’impression de reconnaître mes autres films –, de ne pas enfermer qui que ce soit dans sa condition sociale. C’est-à-dire que même si vous êtes une victime sociale, vous êtes d’abord un être humain. Il y a un mystère en plus. Et donc de rendre hommage à cette communauté – je pense à la scène avec l’oncle quand il parle des bars ou des boîtes de nuit qui étaient interdites aux Arabes – et de parler des couches défavorisées mais sans les enfermer dans leur détermination psychologique, je crois que c’était ça qui me faisait très envie.
Avec l’adaptation de ce fait divers, vous collez au réel et on ne retrouve pas la bande d’acteurs qui peuplent habituellement votre imaginaire et votre cinéma romanesque jusqu’aux prénoms des acteurs Marie, Claude, Daoud plus en rapport avec la réalité. Vous avez, pour ce film, choisi des acteurs plus en prise avec le réel comme Roschdy Zem, Sara Forestier, Léa Seydoux. Comment avez-vous eu l’idée de réunir ces deux actrices aux performances, au demeurant, époustouflantes ? Les deux chemins étaient presque opposés. C’est-à-dire que Sara a fait beaucoup de films très réalistes et a réalisé un film également très réaliste « M » sur une jeune femme bègue qui tombe amoureuse d’un garçon illettré. Et quand j’ai vu la performance de Sara dans le film, je me suis dit que des performances d’actrice de ce niveau on en voit tous les dix ans. Donc, je lui ai envoyé une lettre avec, en cadeau, le DVD de « Un été avec Monika » de Bergman, en lui écrivant que, comme Harriet Andersson à l’époque, quand elle apparaît dans son film, il y a quelque chose de nouveau qui apparaît au cinéma. Elle m’a juste répondu un mot écrit à la main : « Où vous voulez, quand vous voulez ». Alors je lui ai tout de suite envoyé le scénario et en réponse j’ai reçu une photo photocopiée de Falconetti dans le « Jeanne d’Arc » de Dreyer disant : « C’est oui ». Elle avait lu le personnage de Marie, et de ce personnage je connaissais tout. En l’écrivant, je le connaissais. Par contre, le personnage de Claude est beaucoup plus mystérieux et il m’a fallu beaucoup de temps pour comprendre qui était Claude, et ce grâce à Léa Seydoux. C’est Léa qui m’a fait appeler par son agent qui m’a dit qu’elle aimerait bien me rencontrer parce qu’elle avait lu le scénario. Et je lui ai dit que je cherchais un couple un peu sexy entre Marie, l’amante, et Claude, l’aimée, mais que les tâches de l’amour étaient totalement réparties. L’aimée n’aime pas l’amante, mais l’amante est amoureuse de l’aimée. Et c’est en travaillant, en lisant avec Léa qu’elle m’a peu à peu guidé à comprendre comment je pouvais représenter le personnage. C’est qu’elle aussi a fait beaucoup de films réalistes. Je pense à « L’enfant d’en haut » ou au film qu’elle a fait avec Rebecca Zlotowski « Belle épine ». Elle a cette passion d’actrice de jouer des rôles populaires, de représenter des gens qui sont des victimes sociales alors qu’elle ne vient pas du tout de là. C’est en parlant avec Léa et en voyant son maintien, en écoutant sa voix pendant qu’on lisait le texte, que je me disais : Claude, elle résiste, elle a une noblesse en elle, elle résiste à tout ; elle résiste et elle s’effondre, et puis elle se relève, elle résiste et elle s’effondre. Et ce mouvement de résister et de s’effondrer, c’était Léa Seydoux. Donc, je dois énormément autant à Sara qu’à Léa, mais sur des modes très différents.
Pour un film policier, il y a beaucoup de retenue dans « Roubaix, une lumière ». Peu de violence dans l’action, pas de violence verbale. Les acteurs sont tous dans la retenue. Ils sont, en fait, tous là où on ne les attendait pas, surtout Roschdy Zem qui sort pour une fois de ses rôles, disons, plus emportés, plus passionnés, ce qui donne plus de force et d’intensité aux personnages. Pourquoi ce choix de tant de retenue ? Je vais parler de Roschdy que j’aime beaucoup. Je me souviens du premier film de lui où il a explosé en France, c’est « N’oublie pas que tu vas mourir » de Xavier Beauvois où il était éblouissant. On s’est dit qu’on allait avoir à faire avec cet acteur-là, qu’il allait rester pendant longtemps. Et il s’est imposé. Et donc, je le connais depuis cette époque. Or, dans les derniers films qu’il faisait, souvent les réalisateurs lui demandaient un peu de faire la gueule ou de bouder ou d’être renfermé. Alors, quand on s’est rencontrés, je lui ai fait lire le scénario et puis je lui ai dit que si ce n’était pas lui je serai vraiment dans l’embarras parce que, sans doute, il faudrait que je fasse un autre film. Il m’a demandé ce qu’il devait penser du personnage et comment il fallait le jouer. Je lui ai simplement dit qu’il y avait un truc, c’est que Daoud il sourit. Et pourquoi il sourit, alors qu’il a une vie extrêmement austère ? A vrai dire, on voit très peu de sa vie privée mais quand on en voit un peu elle n’est pas rigolote et pourtant, quand il est avec les gens, il leur sourit. Et il n’est jamais familier, mais il a ce sourire. Et le sourire de Daoud, moi je ne sais pas pourquoi il sourit mais lui, il est acteur et donc, c’est à lui à trouver ce sourire. Et le jour où Roschdy sourit, ce jour-là le film est gagné parce qu’il a une lumière en lui, comme « Roubaix, une lumière ». Le film pourrait, du reste, s’appeler « Daoud, une lumière ». Il accepte de donner enfin ce sourire qu’il a retenu pendant des décennies au cinéma. On lui donnait des rôles virils, des rôles de gueulards et, tout d’un coup, il y avait une douceur et une attention aux gens qui était miraculeuse.
Pouvez-vous nous éclairer sur le choix du titre « Roubaix, une lumière » voire même le titre en anglais « Oh Mercy » ? Le titre français, je l’ai cherché pendant longtemps. On l’a travaillé, on l’a remis en question mille fois. Il y a ce dialogue dans le film qu’il ne faut pas enfermer les gens dans leur misère en leur disant qu’ils sont victimes. Avant d’être une victime, on est un être humain. Et il y a cette réplique qui me frappe fortement à la fin du film – mais ce n’est pas un spoiler –, quand le commissaire Daoud est avec le jeune lieutenant, ce dernier lui demande : « Vous faites comment avec la misère ? », et il lui répond : « Vous savez, parfois tout s’illumine ». Voilà, c’est ça. C’est Roubaix. On traite les situations les pires qui soient, et pourtant il y a ce sourire de Daoud qui dit que ce n’est pas grave parce que ça s’illumine. Et donc de voir la lumière, même quand vous êtes dans des conditions défavorisées et même quand vous êtes en plein hiver, de voir qu’il y a quelque chose qui scintille, évidemment que c’est passionnant. Et puis il m’a fallu trouver le titre en anglais. Bien sûr qu’à l’international, pour vendre un film qui s’appelle « Roubaix, une lumière », en n’ayant aucune idée où se trouve Roubaix, ça ne marche pas du tout. Donc, je cherchais le titre et mes amis se moquaient de moi. Surtout Kent [Jones] qui passe régulièrement à la maison et qui me disait : « Roubaix, a light », ridicule ! Et j’ai finalement trouvé le titre en passant d’abord par le poète irlandais Yeats, parce qu’à un moment le jeune lieutenant dit un vers de Yeats que j’aime beaucoup « Pitié plus qu’on ne peut dire se cache au coeur de l’amour » [A pity beyond all telling is hid in the heart of love – NDLR]. Mais Pitié/A Pity dans un film, ça ne marchait pas. Et un matin, je me suis réveillé, pendant le tournage, et j’avais le titre : c’était l’album de Bob Dylan « Oh Mercy ». Et quand je parlais précédemment du sourire de Daoud ou de l’humanité de Roschdy, le fait de montrer un Arabe miséricordieux, du coup, je trouvais ça parfait à une époque où les Arabes pouvaient être montrés comme les assassins ou le danger, etc. Maintenant, la miséricorde, elle ne vient pas de celui qui a la foi, du jeune lieutenant, la miséricorde elle vient de celui qui est athée, qui est arabe, qui est là et regarde les gens. Il se sent à égalité avec tout le monde et, tout d’un coup, il y a une compassion qui passe ou une miséricorde ou même le pardon, avec un titre un peu gospel, puisque c’est un album de Bob Dylan qui s’appelle « Oh Mercy » et qui m’avait frappé quand j’avais 25 ans. Et donc, voilà, j’avais le titre.
Avec cette réflexion sur le mal, la culpabilité et la miséricorde dans « Roubaix, une lumière », doit-on y voir un message ? Il y a des grands films à message, bien sûr, et je pense à Ken Loach. C’est un cinéaste qui fait des films à message mais moi, je ne sais pas faire ça. Par contre, ce que je sais, c’est avoir une position morale comme je l’ai déjà mentionné. C’est vrai qu’il faut prendre en compte, écouter la misère des gens mais il ne faut pas écouter que ça. Il faut écouter la grandeur qu’ils ont en eux, sinon je trouverais que ce serait affreux car ils seraient deux fois victimes : victimes socialement et victimes dans l’affliction parce qu’on les enferme toujours dans leur statut. Alors, tous ces personnages que l’on voit au début du film, c’est un portrait de toute la ville et puis après, dans la deuxième partie, le film se concentre sur les deux femmes. Donc, tous ces portraits de gens qu’on croise, on les accepte tels qu’ils sont avec la vie et la grandeur ou le côté ridicule qu’ils peuvent avoir.
Mais que ce soit dans le monde imaginaire ou réel, dans un milieu bourgeois ou défavorisé, on retrouve à travers vos films la même inquiétude de la jeunesse, des hommes en perte de repères, des femmes en prise avec leur destin. Même si le burlesque est souvent mêlé au drame – et, précisément, parce que le burlesque s’invite dans la tragédie – cela ne cache-t-il pas une profonde désespérance existentielle ? J’aime bien les mélodrames. Je préfère pleurer au cinéma que rigoler. Plus c’est pleurant (comme disent mes nièces), plus je suis client. Mais je pense quand même que le désespoir peut être aussi une illusion. C’est trop facile de penser que le monde est désespérant. Et quand vous allez au cinéma, vous y allez pour que ça scintille sur l’écran et que l’écran vous montre qu’il y a une sortie, qu’il y a une lumière qui brille ailleurs, et il y a une promesse dans un film. Je pense que dans la vie de tous les jours, si on regarde la politique, le monde tel qu’il va, on peut être désespéré et j’ai l’impression qu’on va au cinéma pour se souvenir que ce n’est pas vrai, que c’est une illusion du quotidien et qu’en fait il y a une promesse dans le monde, aussi brutal et aussi sombre qu’il puisse être. Dans « Un conte de Noël », le fils ne s’entend pas du tout avec sa mère, ils se disputent tout le temps. Ils font quand même la greffe, et Catherine Deneuve est alors d’un côté d’un rideau, en chambre stérile, le fils Mathieu Amalric de l‘autre côté, et elle dit : « Mais je vais m’en sortir ; je vais vivre ou je vais mourir. Et le fils, avec un geste de grande cruauté, prend une pièce, jette la pièce et fait pile ou face. « Montre-moi », lui dit-elle. Et il répond : « Non, je ne te montrerai pas. » C’est cruel et, en même temps, c’est la chance, le hasard. Il y a une promesse, la promesse que peut-être elle va guérir, que peut-être ça va bien se passer, et il y a aussi une moquerie, une ironie. Et, tout d’un coup, ça permet de montrer que les choses sont un peu plus compliquées que juste le désespoir ou d’être béat de joie – il y a une promesse.
Vous opérez souvent des plongées dans le moi profond (« Trois souvenirs de ma jeunesse ») jusqu’à démêler les troubles psycho-traumatiques de « Jimmy P. – Psychothérapie d’un Indien des plaines » (adapté du livre éponyme du psychanalyste Georges Devereux) ou jusqu’à même, avec le commissaire Daoud dans « Roubaix, une lumière », amener avec une surprenante douceur et habileté les coupables à avouer. De quel côté du miroir vous sentez-vous le plus à l’aise ? Etes-vous un Jimmy P. ou un Devereux ? Je crois que je suis un Jimmy P. et le cinéma est mon Devereux. Peut-être que dans « Roubaix, une lumière », je suis peut-être un peu plus Daoud que les filles, peut-être je bascule de l’autre côté. Mais c’est vrai que j’ai tendance à m’identifier au sauvage et pas au savant. J’ai une amitié immédiate pour le patient. Je peux penser à un autre patient, à Mathieu Amalric dans « Rois et reine » quand il est chez sa psychanalyste. Il la regarde et puis il dit : « Je fais des rêves, je ne sais pas de quoi je rêve. J’ai rêvé que vous montiez sur une échelle et je regardais sous votre jupe. » Voilà. Je m’identifie à ça. Et il y a des gens qui aiment savoir. Je pense aussi à « Trois souvenirs de ma jeunesse », dans lequel il y a l’élève qui va voir sa professeur et qui lui dit : « Vous avez plein de bons élèves, alors moi je pourrais être le plus mauvais. » Pour ma part, je me place du côté des mauvais élèves, et c’est peut-être mon complexe de l’autodidacte parce que je n’ai pas fait d’études. Et donc, du coup, je me place du côté de ceux qui n’ont pas fait d’études au début du récit.
Quels sont les cinéastes qui vous ont nourri, le plus marqué voire influencé ? Il y en a deux qui me semblent évidents – et il y en a sûrement plus que deux –, c’est Truffaut et Bergman. En tout cas, je ne peux même pas dire… ma dette, elle est plus grande encore que ça. Si je n’avais pas eu la révélation de Truffaut que j’ai eu très tard dans ma vie, je n’aurais sans doute pas réalisé mon premier film. Je suis français, né en 1960, ça veut dire évidemment que j’adorais Godard et détestais Truffaut, et puis j’ai revu ses films. Bien sûr, je les connaissais – je les avais vus à l’école, avec les parents, à la télé, ça me saoulait –, et, un jour, je suis retourné, tard dans ma vie, à 25/26 ans, voir un film que je croyais connaître par coeur. J’ai revu « Les quatre cents coups » au cinéma 3 Luxembourg. Et c’est comme Claudel qui découvre la Sainte Vierge à Notre-Dame de Paris ; j’ai, tout d’un coup, vu la mise en scène que je cherchais depuis mon école de cinéma. Chaque plan est voulu, totalement voulu, il n’y a pas de marge d’erreur possible, et il y a une volonté qui préside à la fabrication de chaque plan ; chaque plan est utile, nourrit le récit, se construit, est fait avec art. En même temps, ça ne se voit pas du tout, ça ne s’affiche pas, c’est très discret. Tous ses films sont des films brûlants et, pourtant, c’est raconté avec une extrême douceur et simplicité. Je suis tombé amoureux fou de l’oeuvre de Truffaut que j’ai commencé à explorer, à revisiter, et je crois que je n’aurais jamais réalisé mon premier film si je n’avais pas eu cette révélation en revoyant « Les quatre cents coups ». Quant à Bergman, ça a été la grande rétrospective à Paris. J’avais vu beaucoup de films de lui, jeune. Je me souviens avoir triché pour voir « Cris et chuchotements » alors que le film était interdit à mon âge et que j’étais rentré dans un cinéma pour le voir. Les films de Bergman, évidemment, ca me passionnait. Et, après, il y a eu la rétrospective à Paris et ils ont sorti l’intégrale, dans l’ordre, au cinéma Saint-André-des-Arts. Et là, j’ai découvert tous les films de Bergman. C’était le choc absolu. Ces deux metteurs en scène-là, j’y pense tout le temps ; ils m’accompagnent.
L’importance du langage dans votre cinéma est primordiale – les références culturelles (littéraires, cinématographiques, psychanalytiques, mythologiques) comme les citations abondent et les clés de lecture ne sont pas forcément à la portée du plus grand nombre. Même dans « Roubaix, une lumière », un film collé au réel, il y a une richesse de dialogues inattendue. Quelle est la finalité de cet exercice de style qui atteint parfois, dans certains de vos films, à la démesure ? Il y a un art du collage qui me plaît. J’aime bien penser au cinéma – et ça peut sembler paradoxal… ou pas – comme un art populaire. Et donc, pour moi un art populaire, un des arts les plus proches du cinéma, plus que le théâtre, ce serait le music-hall. Si je devais faire un numéro de music-hall dans les années 70, par exemple, vous auriez des numéros dansés, des ballets et, tout d’un coup, vous faites le silence, vous avez un grand escalier et vous voyez Marguerite Duras qui descend en récitant les premières lignes de « L’amant », qui s’assied et qui termine sur sa récitation de « L’amant ». A ce moment-là, noir… et, soudain, il y a douze filles qui dansent en chorus girls. Pour moi, c’est ça le cinéma. C’est de mélanger des genres différents. C’est d’aller voler des éléments dans les arts savants et de les ramener dans la rue. Il y a une scène comme ça que j’aime bien dans « Trois souvenirs de ma jeunesse » : le jeune homme, qui est un peu trop sage, va au musée, avec une fille qui s’ennuie. Il regarde un paysage de Hubert Robert et elle lui demande pourquoi il aime ce tableau et il lui dit que c’est parce qu’il est beau comme elle. Et elle le met au défi de le lui prouver. Il compare alors un tableau classique, stendhalien à une fille de la rue. Et ce que j’aime bien c’est, plutôt que de laisser au savant la poésie, la philosophie, les textes littéraires, de les prendre et de les ramener et de dire qu’on peut s’en servir, qu’on peut bricoler des trucs avec, essayer de prendre le matériel noble et de fabriquer du music-hall avec ça. Pour moi, ce serait une des définitions du cinéma.
Pour ce qui est de l’écriture, vous écrivez tous vos scénarios. Les répliques sont très travaillées, percutantes, voire parfois choquantes. Vous semblez prendre plaisir à cette écriture, mais ne disiez-vous pas qu’au début de vos divers apprentissages dans le métier, l’écrit n’était pas votre fort. Comment s’est opérée cette évolution ? C’était que je n’arrivais pas à trouver une voi(e)x. C’était plutôt ça le problème que j’avais au sortir de l’école du cinéma. Je parlais, mais quand je parlais je n’étais pas singulier. Et j’avais l’impression que je trouverais ma voi(e)x à travers Bergman et Truffaut. Je me suis alors dit que si j’arrivais à dire dans mes films que je les admirais, déjà ce ne serait pas mal. J’ai commencé à trouver ma voi(e)x comme ça. Et au moment où j’ai réussi à trouver ça… Disons que je suis un cinéaste cinéphile et qu’il y a donc des films réalistes que j’admire beaucoup – et j’admire tout le cinéma, pas un bout du cinéma, le cinéma en entier –, mais quand je fabrique des films, j’ai un peu un ennemi, c’est le réalisme. C’est-à-dire que l’idée que des gens doivent se dire des choses sans aucun intérêt en marmonnant et que, du coup, la scène en sera plus réelle et donc meilleure, ça je n’y crois pas du tout. Dans mes films, j’essaie de filmer des moments exceptionnels, donc de filmer des moments où les gens disent des phrases où ils se surprennent à dire une phrase bizarre. Je vais donner juste un exemple que j’adore et qui m’a rendu fou quand je l’ai vu. Dans « Les deux Anglaises et le continent », Jean-Pierre Léaud voit cette actrice anglaise qui descend l’escalier ; ils se croisent et il pose la main sur son épaule. Elle dit : « Pourquoi vous me touchez ? » Et lui de répondre : « Parce que vous venez de la Terre, et je crois que j’aime ça. » Je me suis dit que c’était génial parce que l’invention littéraire est tellement forte que vous vous souvenez de ce moment toute votre vie. Alors que s’il avait dit qu’il la trouvait mignonne, la scène aurait été un cliché. Et là, tout d’un coup, le mec se demande ce qu’il vient de dire ; il a dit une grande phrase et il est tout surpris de sa performance. Et c’est vrai que j’aime bien filmer des moments un peu exceptionnels. Donc, je cherche dans la vie de mes héros les moments où ils se surprennent à dire des trucs qui sont plus grands qu’eux. Et c’est ça que j’aime bien au cinéma.
Vous dites que vos films sont comme un labyrinthe. Vous lancez des pistes, les noms des personnages semblent sortis de nulle part avec des prénoms récurrents sur des visages différents mais appartenant aux mêmes acteurs. Les Sylvia, les Esther, les Ismaël se succèdent, les visages différents se superposent tout comme vos films jusqu’à ne former plus qu’un. Un jeu de pistes dans lequel le spectateur se plaît, toutefois, à se perdre. C’est un truc que j’ai piqué à Bergman justement. Je regardais donc cette rétrospective quand j’étais dans ma vingtaine d’années et je suivais tous les films, et puis on voyait Elisabet Vogler [Liv Ullman dans « Persona » – NDLR]. Ensuite, on revoyait un autre film, et il y avait Veronica Vogler mais ce n’était pas la même actrice qui jouait [Ingrid Thulin dans « L’heure du loup » – NDLR). Et puis on voyait le couple qui se détestait – il y a toujours un couple qui se déteste dans les films de Bergman –, les Vergerus, et après ça quand vous voyiez le pasteur dans « Fanny et Alexandre », il s’appelait aussi Vergerus. Et vous vous dites pourquoi ce sont les mêmes noms ? Et donc, il y a des trucs comme ça que j’ai l’impression de reproduire à chaque fois que je fais un film. Même là, dans mon dernier film, les prénoms ont l’air d’être naturels : le commissaire s’appelle Yakoub Daoub, Jacob David. C’est un drôle de nom mais, du coup, c’est un nom dont vous vous souvenez. Mais j’ai l’impression que refaire un film pour moi, un nouveau film, c’est de monter au grenier : j’ouvre une vieille malle et dans la malle, j’ai quatre masques, cinq accessoires, trois vieux manteaux, quelques noms et avec ça on essaie de fabriquer du nouveau. On les mélange et puis on se dit que ce sera une autre histoire. Mais ce n’est pas vrai. On reprend toujours, comme on dit en anglais, « rags and bones » [les vieilles fripes – NDLR] et on les transforme et on essaie de refabriquer du nouveau avec des vieilles hardes et des vieux déguisements. Est-ce à dire que vous allez prochainement rouvrir la malle, mais vers quelle continuité ? C’est curieux parce que c’est vrai qu’on fait un film contre le précédent, et souvent en réaction. Je pense, par exemple, à une réaction très forte que j’avais eue quand j’avais fait un film qui n’était montré qu’à la télévision et qui s’appelait « La forêt », une adaptation qui n’est passée qu’une seule fois sur Arte. C’était avec les comédiens de la Comédie-Française et c’était un texte très noble d’Alexandre Ostrovski, que je connaissais bien et dont j’avais vu la mise en scène de Fomenko. Je tournais avec Denis Podalydès, Michel Vuillermoz, Martine Chevallier, que des acteurs qui savent tout faire. Et je me suis alors dit que je commençais à être vieux et que je n’avais jamais fait de films avec des jeunes gens. Je ne travaillais qu’avec des acteurs qui étaient des virtuoses, mais saurais-je jouer avec des gens qui n’avaient jamais fait de film (?) J’ai donc rencontré cette jeune fille qui avait 17 ans, Lou Roy-Lecollinet, ce jeune homme qui en avait 18, Quentin Dolmaire, et toute la bande autour, et suis enfin arrivé à écrire pour des jeunes. Ainsi « Trois souvenirs de ma jeunesse », mon film suivant, était fait contre le précédent. Donc, j’essaie de me surprendre moi-même à chaque nouveau film et, pourtant, de rester fidèle à une certaine conception du cinéma. Sûrement, c’est la tension dans laquelle je me tiens.
Figure de proue du cinéma d’auteur français, vous faites aussi un peu figure de « dernier des Mohicans ». On entend ici et là que les pouvoirs publics se désintéresseraient du cinéma d’auteur, que le système français ne serait pas propice à l’émergence d’auteurs. Récemment, une vingtaine de cinéastes ont signé une tribune contre une loi audiovisuelle à venir qui pourrait mettre à mal l’exception culturelle française. Etes-vous inquiet pour le cinéma d’auteur ou le cinéma en général ? Surtout le cinéma d’auteur, bien sûr, mais aussi ce qu’appelait Pascale Ferran un temps, même si je n’étais pas tout à fait d’accord avec elle, les films « du milieu ». Je trouvais l’expression un peu malheureuse. On dit cinéma d’auteur, mais vous prenez Alain Resnais, pour lequel j’avais la plus grande admiration et la plus grande amitié, son film « On connaît la chanson » a fait plus de 2 millions d’entrées. C’est un film populaire ; et donc, ça dépend des fois. Je suis extrêmement soucieux parce que, comme je l’expliquais à des Finlandais, en France, pour quelqu’un comme moi qui suis provincial et qui ne viens pas d’une grande ville – je n’étais pas à Lille, mais à Roubaix –, il n’y avait pas beaucoup de cinémas mais il y avait une chance, que je croyais être une chance mais qui était, en fait, une volonté politique : c’était qu’on avait la télévision publique, un service public qui savait montrer les films. Et, donc, que vous soyez bourgeois ou de famille populaire, vous aviez un bagage cinématographique parce que vous aviez traîné devant la télé chez vos grands-parents et parce que la télévision savait montrer un John Ford, un Hitchcock, un film de Truffaut ou de Eustache. Il y avait les ciné-clubs, les films de divertissement, les films politiques, les films sociétaux ; vous aviez les films pour enfants, les films d’art et d’essai, les films d’aventures, il y avait des tas de choses qui se passaient. Et cet art très français que, par exemple, les Italiens n’ont jamais eu, pas plus que les Américains ou même les Anglais – ils ne savaient pas montrer les films à la télévision – nous, on savait. Et j’ai appris pourquoi : c’est parce qu’il y avait des accords entre le CNC [Centre national du cinéma – NDLR] et l’ORTF [Office de radio-télévision française – NDLR]. C’étaient tous des compagnons de la libération, qui mangeaient au même restaurant parce que l’ORTF était juste à côté du CNC. Et les uns demandaient aux autres ce qu’ils pouvaient faire pour les aider à avoir plus d’audience, et ils l’ont fait. Et cet art français a disparu en six ans, dix ans. Maintenant, ils ne savent plus montrer des films, à part peut-être ARTE. Et donc, ce qui est terrible, c’est que ça crée une injustice entre Paris et la province, une injustice entre les bourgeois et les gens issus des classes populaires parce que vous n’avez pas le même savoir, pas la même connaissance, parce que le sens du service public s’est perdu à la télévision avec l’arrivée des chaînes privées. Et alors, maintenant qu’on a un gouvernement libéral, on entend qu’il faut supprimer la redevance, qu’il faut réduire France Télévisions, etc. Mais enfin, il y a un service public qui marche, pourquoi le casser ? C’est totalement aberrant. Je suis extrêmement préoccupé et en complète sympathie avec mes camarades réalisateurs. Ce qui est très inquiétant depuis non seulement un quinquennat mais deux quinquennats, c’est l’absence de politique culturelle en France qui est tout à fait alarmante. Trois quinquennats, même ! 15 ans… ça commence à faire longtemps.
Quels sont vos projets cinématographiques ou autres ? Je ne sais pas ce que je vais écrire parce que, à chaque fois, pour savoir ce que je vais écrire – comme je le disais, je fabrique toujours un film un peu contre le précédent – j’ai besoin du public, j’ai besoin de savoir comment le public reçoit mon dernier film pour rebondir sur autre chose. Alors, bien sûr, j’ai de vagues projets de cinéma mais je ne saurais pas le raconter, non pas par esprit de mystère mais c’est tellement flou dans ma tête que je ne sais pas. Par contre, je sais que c’est quelque chose qui se règle dix jours après la sortie du film en France. Dix jours après, je sais ce que je fais, et je m’y mets. Mais il faut que le film soit sorti en France. Or, comme mon film sort fin août, je suis jusque-là dans une situation d’extrême luxe. Par ailleurs, j’ai un autre projet de longue date qui commence en octobre, au Français, et qui sera ma deuxième mise en scène à la Comédie-Française. Je mets donc en scène « Angels in America » en création à la Comédie-Française. Les répétitions débuteront à partir du mois d’octobre et on commencera à jouer à partir de janvier. Je suis terrifié dans la mesure où je ne viens pas du tout du théâtre. Je n’ai aucun savoir, même si j’ai déjà adapté une pièce à la Comédie-Française. Mais c’était un Strindberg. C’était facile parce que je connaissais tout par coeur à cause de Bergman. Par ailleurs, c’était un Kammerspiel et, donc, il n’y avait pas beaucoup de personnages, tandis que là c’est Tony Kushner, et la version originale que j’ai adaptée de « Angels in America » dure sept heures. C’est monstrueux comme spectacle à fabriquer. Et j’ai un trac terrible parce que je n’ai pas la connaissance. Ça me met en danger et, de ce fait, ça me met en vie. C’est extrêmement agréable. Donc, c’est mon prochain rendez-vous. J’ai tout l’été, et maintenant j’attends le mois d’août pour voir comment les spectateurs réagissent à la sortie de « Roubaix, une lumière ». Puis, il faut que je me mette vite à écrire en septembre, et, en octobre, je disparais du monde. Je disparais dans les caves de la Comédie-Française, parce que les salles de répétition sont dans les caves, et je sais déjà que j’aurai un plaisir fou parce que je vais travailler avec des acteurs merveilleux et que je suis fou du texte de Kushner. Je vais donc adorer ça. C’est une pièce, en fait, très politique sur les années sida et dont le héros très sombre, maléfique – il y a des héros positifs mais il y a aussi un méchant de théâtre comme Richard III – est le personnage de Roy Cohn : juif et antisémite, homosexuel et homophobe, à moitié fasciste, d’un racisme invraisemblable contre les Afro-Américains et qui est à la fois drôle et terrifiant. Et ce Roy Cohn a existé. Il était l’avocat de McCarthy, pendant le maccarthysme. Son anti-communisme virulent a du reste valu à Ethel Rosenberg d’être condamnée à la chaise électrique. Par ailleurs, ce Roy Cohn a été le premier avocat de Trump et même son mentor. Et donc, après l’élection de Trump qui m’avait marqué – alors que la pièce a vingt ans –, je trouvais que ça lui donnait une nouvelle actualité puisque Roy Cohn, celui-là même qui avait introduit Trump à la chose politique, revenait de ce fait au devant de la scène. Et, donc, je suis tout dévoué à cette pièce ; ça fait deux ans que je travaille dessus et maintenant je suis prêt. Elle arrive enfin et c’est un moment très heureux pour moi.
Propos recueillis par Aline Vannier-Sihvola Sodankylä, le 15 juin 2019
Vendredi 14 octobreà 20 h 15 LE SANG D’UN POÈTE / RUNOILIJAN VERI (1930) Jean Cocteau Avec Lee Miller, Enrique Rivero, Pauline Carton France – 53 min Intertitres français, sous-titres anglaiset finnois Mis en musique par le trio jazz-rock lituanien SHEEP GOT WAXED
Samedi 15 octobre à 19 h 30 DANS LA NUIT (1929) Charles Vanel Avec Charles Vanel, Sandra Milovanoff France – 90 min Intertitres français, sous-titres anglais Accompagné par le légendaire groupe finlandais CLEANING WOMEN
Consulter l’ensemble de la programmation sur kinoregina.fi
Festival international du film de Helsinki – Amour & Anarchie 15-25 septembre 2022
Le Festival international du film de Helsinki – Amour & Anarchie a lieu chaque année, depuis 1988, en septembre. Il fête cette année sa 35e édition et se déroulera du 15 au 25 septembre 2022. Le Festival s’ouvrira avec « Triangle of Sadness », une comédie satirique du cinéaste suédois Ruben Östlund (Palme d’or/Cannes 2022 après une première Palme d’or pour « The Square » en 2017) et se clôturera avec « The Banshees of Inisherin » du réalisateur irlandais Martin McDonagh (Prix du Meilleur scéanario/ Mostra de Venise 2022).
Le Festival Amour & Anarchie – le plus grand festival du film de Finlande et, également, le plus accessible –, met en valeur de nouveaux films inventifs, visuellement étonnants et controversés, révèle les talents prometteurs de demain. Parfois décoiffant, mais à voir !
Les salles Bio Rex, Kinopalatsi, Kino Regina, Cinema Orion, Maxim, Korjaamo Kino, Kino Engel, Kino Tapiola, Riviera, WHS Teatteri Union, Savoy-teatteri, Tennispalatsi, Finnkino Itis et Tripla assureront un total de 600 projections.
Cette année, au programme des quelque 180 longs et 170 courts métrages du monde entier présentés lors des 11 jours de cette 35e édition, une sélection des meilleurs films français et francophones dernièrement sortis, dont :
AVEC AMOUR ET ACHARNEMENT / BOTH SIDES OF THE BLADE (2022) Claire Denis France – 116 min
LES PASSAGERS DE LA NUIT / THE PASSENGERS OF THE NIGHT (2022) Mikhaël Hers France – 111 min
LES OLYMPIADES, PARIS 13e / PARIISI, 13. KAUPUNGINOSA (2022) Jacques Audiard France – 105 min
LES PIRES / THE WORST ONES (2022) Romane Gueret, Lise Akoka France – 99 min
TOUT S’EST BIEN PASSÉ /KAIKKI MENI HYVIN (2021) François Ozon France/Belgique – 113 min
PETER VON KANT (2022) François Ozon France/Belgique – 85 min
LA LIGNE / THE LINE (2022) Ursula Meier France/Belgique/Suisse – 102 min
UN MONDE / PLAYGROUND (2021) Laura Wandel Belgique/France – 72 min
LA NUIT DU 12 / THE NIGHT OF THE 12TH (2022) Dominik Moll France/Belgique – 97 min
L’ÉVÉNEMENT / HAPPENING (2021) Audrey Diwan France – 100 min
CALAMITY (2020) Rémi Chayé France/Danemark – 85 min Film d’animation
RODÉO (2022) Lola Quivoron France – 105 min
ALLONS ENFANTS / ROOKIES (2022) Alban Teurlai, Thierry Demaizière France – 110 min
Sembène Ousmane (12.4.2006)
PLUS QUE JAMAIS /MORE THAN EVER (2022) Emily Atef France/Allemagne/Luxembourg/Norvège – 122 min
PETITE MAMAN / MAJA LAPSUUDEN REUNALLA (2022) Céline Sciamma France – 73 min
TOUT LE MONDE AIME JEANNE / EVERYBODY LOVES JEANNE (2022) Céline Devaux France – 95 min
HEARTBEAST / SYDÄNPETO (2022) Aino Suni Finlande/France/Allemagne – 102 min
Les films français en programmation pour la saison automne-hiver 2022
Bibliothèque Oodi / Keskustakirjasto Oodi Töölönlahdenkatu 4 – Helsinki
KINO REGINA – 251 places face à un écran géant de 11 mètres – a réouvert ses portes dans l’enceinte de la bibliothèque OODI, élue meilleure bibliothèque au monde en 2019. La cinémathèque offre en ce début d’automne 2022 une programmation riche de films aux registres variés, dont une sélection des meilleurs films français.
KINO REGINA rend hommage cet automne à l’un des plus grands cinéastesde tous les temps, le scénariste et réalisateur français Jean Renoir, avec la programmation de dix de ses meilleurs films.
RÉTROSPECTIVE JEAN RENOIR
LA GRANDE ILLUSION / SUURI ILLUUSIO France (1937), 117 min Le 07.09. à 19 h 00 Le 10.09. à 15 h 50
LA CHIENNE / YÖPERHONEN France (1931), 100 min Le 27.09. à 19 h 10 Le 01.10. à 14 h 00
LA NUIT DU CARREFOUR / TIENRISTEYKSEN YÖ France (1932), 75 min Le 11.10. à 17 h 00 Le 20.10. à 20 h 45
BOUDU SAUVÉ DES EAUX / BOUDU ELI MITEN VÄTTYÄ HUKKUMASTA France (1932), 84 min Le 18.10. à 17 h 00 Le 22.10. à 15 h 45
TONI France (1935), 84 min Le 26.10. à 19 h 05 Le 29.10. à 14 h 00
LE CRIME DE MONSIEUR LANGE / HERRA LANGEN RIKOS France (1935), 79 min PARTIE DE CAMPAGNE / VIRTA France (1936), 41 min Le 03.11. à 18 h 30 Le 06.11. à 15 h 30
LES BAS-FONDS / POHJALLA France ( 1936), 92 min Le 09.11. à 19 h 35 Le 12.11. à 16 h 00
LA MARSEILLAISE / MARSELJEESI France (1938), 138 min Le 18.11. à 19 h 00 Le 20.11. à 16 h 00
LA BÊTE HUMAINE / IHMISPETO France (1938), 100 min Le 24.11. à 17 h 00 Le 27.11. à 15 h 45
________________________________________________________________ À NE PAS MANQUER ÉGALEMENT :
LES GLANEURS ET LA GLANEUSE / ELÄMÄ ON KAUNIS Agnès Varda France (2000), 82 min Le 15.09. à 19 h 05
Le film du mois TITANE Julie Ducournau France / Belgique (2021), 108 min Le 14.09. à 21 h 05 Le 28.09. à 19 h 00
GRAVE / RAW Julie Ducournau France / Belgique / Italie (2016), 99 min Le 04.10. à 20 h 15 Le 07.10. à 20 h 45
Dans le cadre du Festival LOUD SILENTS 14–16 octobre
LE VOYAGE DANS LA LUNE / MATKA KUUHUN Georges Méliès France (1902), 14 min Il y a 120 ans, l’enchanteur Méliès nous offrait la lune ! Le Festival en proposera une projection dans sa version restaurée et colorisée.
Dans la série HISTOIRE DU CINÉMA MONDIAL, deux ciné-concerts :
ALICE GUY (1896-1907) Courts métrages réalisés entre 1896 et 1907. Ciné-concert le 01.11. à 17 h 00
GEORGES MÉLIÈS Le voyage de Gulliver (1902), Quat’cents farces diable (1906), Le chaudron infernal (1903), Le royaume des fées (1903), Le voyage dans la lune (1902) France (1902-1906), 53 min Ciné-concert le 08.11. à 17 h 00
La XXXIIIe édition du Festival international du film Espoo Ciné aura lieu du 29 août au 4 septembre et s’ouvrira cette année avec « Three Thousand Years of Longing », dernier opus du réalisateur australien George Miller qui a engendré la série des Mad Max (le 4e en préparation). L’édition Espoo Ciné 2022 se déroulera cette fois-ci encore à l’automne et offrira une tout aussi belle programmation que les éditions précédentes.
Le Festival a pour vocation de mettre en valeur divers talents cinématographiques européens et de faire découvrir des films du moment, parfois inédits en Finlande. Il projettera à cette occasion quelque 80 longs métrages, dont une vingtaine de films français et francophones (voir liste ci-dessous).
Les projections se dérouleront dans les salles de Louhisali, Tapiolasali et du Kino Tapiola à Espoo, du Finnkino Omena à Matinkylä, du Finnkino Sello de Leppävaara ainsi qu’au Cinéma Orion au centre de Helsinki. « Supereroi », comédie dramatique du réalisateur italien Paolo Genovese, clôturera le festival.
Films français et francophones au programme du Festival Espoo Ciné :
LES CHOSES HUMAINES / THE ACCUSATION Film de Yvan Attal France (2021), 138 min Langue : français avec sous-titres anglais
PARADIS SALE / AFTER BLUE Film de Bertrand Mandico France (2021), 130 min Langues : français, anglais, polonais avec sous-titres anglais
AVEC AMOUR ET ACHARNEMENT / BOTH SIDES OF THE BLADE Film de Claire Denis France (2022), 116 min Langue : français avec sous-titres anglais
FRÈRE ET SOEUR / BROTHER AND SISTER Film de Arnaud Desplechin France (2022), 108 min Langue : français avec sous-titres anglais Lire Entretien avec Arnaud Desplechin sur cinefinn.com : – Festival du soleil de minuit/Sodankylä – juin 2019
PRESQUE / KAUNIIT SIELUT Film de Bernard Campan, Alexandre Jollien France / Suisse (2021), 92 min Langue : français avec sous-titres finnois, suédois
LA FRACTURE / THE DIVIDE Film de Catherine Corsini France (2021), 98 min Langue : français avec sous-titres anglais
FRANCE Film de Bruno Dumont France/Allemagne/Italie/Belgique (2021), 133 min Langue : françaisavec sous-titres anglais
UNE FEMME DU MONDE / HER WAY Film de Cécile Ducrocq France (2021), 97 min Langue : français avec sous-titres anglais
SERRE-MOI FORT / HOLD ME TIGHT Film de Mathieu Amalric France / Allemagne (2021), 97 min Langue : français avec sous-titres : anglais
VOUS NE DÉSIREZ QUE MOI / I WANT TO TALK ABOUT DURAS Film de Claire Simon France (2021), 95 min Langue : français avec sous-titres anglais Lire Entretiens avec Claire Simon sur cinefinn.com : – Espoo Ciné – août 2014 – Docpoint – janvier 2019
L’ÉTAT ET MOI Film de Max Linz Allemagne (2021), 85 min Langues : allemand, français avec sous-titres anglais
ILLUSIONS PERDUES / LOST ILLUSIONS Film de Xavier Giannoli France (2021), 141 min Langue : français avec sous-titres anglais
DALVA / LOVE ACCORDING TO DALVA Film de Emmanuelle Nicot France / Belgique (2022), 83 min Langue : français avec sous-titres anglais
LES MAGNÉTIQUES / MAGNETIC BEATS Film de Vincent Maël Cardona France / Allemagne (2021), 98 min Langue : françaisavec sous-titres anglais
LA NUIT DU 12 / THE NIGHT OF THE 12TH Film de Dominik Moll France / Belgique (2022), 114 min Langue : français avec sous-titres anglais
VIENS JE T’EMMÈNE / NOBODY’S HERO Film de Alain Guiraudie France / Allemagne (2022), 99 min Langue : français avec sous-titres anglais
MON LÉGIONNAIRE / OUR MEN Film de Rachel Lang Belgique / France (2021), 106 min Langues : français, anglais, russe avec sous-titres anglais
UN MONDE / PLAYGROUND Film de Laura Wandel Belgique (2021), 72 min Langue : français avec sous-titres anglais
TOM MEDINA Film de Tony Gatlif France (2021), 100 min Langues : français, occitan, espagnol avec sous-titres anglais
TU ME RESSEMBLES / YOU RESEMBLE ME Film de Dina Amer Etats-Unis / France / Egypte (2021), 90 min Langues : français, arabe, anglais avec sous-titres anglais
Midnight Sun Film Festival / Festival du film du soleil de minuit Du 15 au 19 juin 2022 – Sodankylä
LE RENDEZ-VOUS DES CINÉPHILES
A l’occasion de sa XXXVIIe édition, le Midnight Sun Film Festival / Festival du film du soleil de minuit se déroule cette année du 15 au 19 juin 2022 à Sodankylä, village en plein cœur de la Laponie finlandaise, au nord du cercle polaire. Créé par les frères Aki et Mika Kaurismäki ainsi que Peter von Bagh – disparu en septembre 2014 –, ce festival au caractère d’exception, baigné par la lumière arctique de l’été et où le spectateur se retrouve en plein soleil au sortir d’une séance à 3 heures du matin !, a attiré au fil des ans les plus grands noms du cinéma international, entre autres : Chabrol, Sautet, Powell, Fuller, Léaud, Forman, Cissé, Kusturica, Kiarostami, Demy, Varda, Scola, Kieslowski, Wenders, Coppola, Tavernier, Béla Tarr et, plus récemment, Assayas, Mike Leigh, Bonello, Hanna Schygulla, Saura, Desplechin… Pourtant, malgré tous ces invités prestigieux, le Festival du film du soleil de minuit demeure un festival anti-paillettes, sans compétition et sans soirée de gala, qui se célèbre en jeans et en baskets et où les cinéastes se mêlent aux spectateurs dans une atmosphère décontractée. Un festival simplement pour le plaisir du cinéma.
Cette année, la XXXVIIe édition du Festival accueille l’acteur et réalisateur français Mathieu Amalric qui est l’auteur de près d’une dizaine de longs métrages et qui s’est imposé dès la fin des années 90 comme l’un des acteurs les plus en vue du cinéma d’auteur. Au cours de sa longue carrière d’acteur, il a notamment beaucoup tourné dans les films d’Arnaud Desplechin (lire Entretien avec Arnaud Desplechin… sous le soleil de minuit – Juin 2019)
Seront présentés aux festivaliers une vingtaine de films français et francophones, dont cinq longs métrages réalisés par Mathieu Amalric et une sélection des toutes dernières meilleures sorties :
ZORN III (2022) Mathieu Amalric
SERRE-MOI FORT / HOLD ME TIGHT (2021) Mathieu Amalric
BARBARA (2017) Mathieu Amalric Langues : français, anglais
LA CHAMBRE BLEUE / THE BLUE ROOM (2014) Mathieu Amalric
TOURNÉE / KIERTUE (2010) Mathieu Amalric
TRALALA (2021) Arnaud Larrieu, Jean-Marie Larrieu Avec Mathieu Amalric
LE SCAPHANDRE ET LE PAPILLON / PERHONEN LASIKUVUSSA (2007) Julian Schnabel Avec Mathieu Amalric
FIN AOÛT, DÉBUT SEPTEMBRE / KUN KESÄ ON OHI (1998) Olivier Assayas Avec Mathieu Amalric ________________________________ LES PASSAGERS DE LA NUIT / THE PASSENGERS OF THE NIGHT (2022) Mikhaël Hers
LES OLYMPIADES, PARIS 13e / PARIISI, 13. KAUPUNGINOSA (2021) Jacques Audiard Langues : français, mandarin, anglais
LINGUI, LES LIENS SACRÉS / LINGUI, THE SACRED BONDS (2021) Mahamat Saleh-Haroun Langues : français, arabe du Tchad
ANNETTE (2021) Leos Carax Langue : anglais – sous-titres finnois
HAPPENING (2021) Audrey Diwan
UN MONDE / PLAYGROUND (2021) Laura Wandel
O MARINHEIRO DAS MONTANHAS / MARINER OF THE MOUNTAINS (2021) Karim Aïnouz Langues : portugais, arabe, français
UN FILS / A SON (2019) Mehdi M. Barsaoui Langues : arabe, français – sous-titres anglais
SIMON MÁGUS / SIMON THE MAGICIAN (1999) Ildikò Enyedi Langues : français, hongrois
LE PETIT PRINCE A DIT / SANOI PIKKU PRINSSI (1992) Christine Pascal
LUMUMBA : LA MORT DU PROPHÈTE / LUMUMBA: DEATH OF A PROPHET (1991) Raoul Peck
LE MONOCLE NOIR / MUSTA MONOKKELI (1961) Georges Lautner
A BOUT DE SOUFFLE / VIIMEISEEN HENGENVETOON (1960) Jean-Luc Godard
Les films français en programmation pour la saison estivale 2022
Bibliothèque Oodi / Keskustakirjasto Oodi Töölönlahdenkatu 4 – Helsinki
KINO REGINA comporte 251 places qui font face à un grand écran de 11 mètres. Dans les conditions actuelles, la salle est actuellement ouverte en entier, à 100% de sa capacité par séance. KINO REGINA a réouvert ses portes dans l’enceinte de la bibliothèque OODI, élue meilleure bibliothèque au monde en 2019. La cinémathèque offre en ce début d’été 2022 une programmation riche de films aux registres variés, dont une sélection des meilleurs films français.
KINO REGINA met cet automne à l’honneur l’acteur français Jean-Pierre Léaud dès ce premier week-end de juin (4-5.06.) dans le rôle d’Antoine Doinel, personnage de fiction cinématographique dans cinq films écrits et réalisés par François Truffaut. Le personnage d’Antoine Doinel apparaît, adolescent, dans Les Quatre Cents Coups, puis grandit, découvre les affres de l’amour, se marie et divorce.
RÉTROSPECTIVE JEAN-PIERRE LÉAUD
LES QUATRE CENTS COUPS / 400 REPOSTA François Truffaut France (1959), 98 min Le 04.06. à 14 h 00 Le 08.06. à 19.00
BAISERS VOLÉS / VARASTETTUJA SUUDELMIA L’AMOUR À VINGT ANS / ANTOINE ET COLETTE François Truffaut France (1968) – France (1962) Le 04.06 à 15 h 50 Le 15.06. à 19 h 00
DOMICILE CONJUGAL / NUORI PARI Francois Truffaut France / Italie (1970), 97 min Le 05.06. à 17 h 30 Le 20.06. à 16 h 30
L’AMOUR EN FUITE / RAKKAUS KARKUTEILLÄ François Truffaut France (1979), 94 min Le 05.06. à 19 h 30 Le 28.06. à 17 h 00
MASCULIN, FÉMININ / MASKULIINI FEMINIINI Jean-Luc Godard France / Suède (1966), 105 min Le 07.07. à 19 h 00 Le 09.07. à 14 h 00
LE DÉPART / LÄHTÖ Jerzy Skolimowski Belgique ( 1967), 93 min Le 12.07. à 19 h 15 Le 15.07. à 17 h 00
PORCILE / SIKOLÄTTI Pier Paolo Pasolini Italie / France (1969), 97 min Le 19.07. à 19 h 00 Le 21.07. à 21 h 00
LA MAMAN ET LA PUTAIN / ÄITI JA HUORA Jean Eustache France (1973), 215 min Le 31.07. à 16 h 30
I HIRED A CONTRACT KILLER Aki Kaurismäki Finlande / Suède (1990), 78 min Le 09.08. à 17 h 00
IRMA VEP Olivier Assayas France (1996), 98 min Le 16.08. à 19 h 10 Le 19.08. à 16 h 45
LE PORNOGRAPHE Bertrand Bonello France / Canada (2001), 108 min Le 23.08. à 17 h 00 Le 30.08. à 19 h 00
LA MORT DE LOUIS XIV Albert Serra France 7 Espagne / Portugal (2016), 115 min Le 31.08. à 16 h 30 Le 04.09. à 16 h 05
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