Le dernier film de Rax Rinnekangas « Luciferin viimeinen elämä » (The Last Days Of Lucifer), dernier volet de sa trilogie après « Matka Edenin » (A Journey to Eden – 2011) et « Veden peili » (Water Marked – 2012), sort actuellement en salles à Helsinki. Pascal Gaigne, compositeur français de renommée internationale résidant à Saint-Sébastien (Pays basque espagnol), a réalisé la musique de chacun des films de Rax Rinnekangas. Il était le mois dernier à Helsinki, accompagné de la mezzo-soprano Itziar Lesaka, pour la première de « Luciferin viimeinen elämä » et, à cette occasion, nous a accordé un entretien.

Rax Rinnekangas a fait appel à vous ces trois dernières années pour composer la musique de chacun des films de sa trilogie. Comment vous êtes-vous rencontrés ? Comment tout cela a-t-il commencé ?
Pascal Gaigne : En fait, Rax Rinnekangas a vu, il y a quelques années de cela, un film de Víctor Erice intitulé « El sol del membrillo » – Le songe de la lumière – qui a gagné deux prix importants à Cannes. C’est un film d’auteur, mais qui a remporté un certain succès dans le monde entier, un documentaire autour du peintre réaliste Antonio López. Et j’ai fait la musique de ce film. Puis, un jour, j’ai reçu un coup de téléphone de quelqu’un qui m’appelait de Helsinki, en espagnol. C’était Rax Rinnekangas qui souhaitait me rencontrer pour me présenter un projet de film. Il me disait venir à Saint-Sébastien la semaine suivante. On s’est donc retrouvés dans un café et on a discuté. Il m’a dit qu’il avait un projet de film dont il n’avait pas encore organisé la production, mais que s’il le faisait, il aimerait bien que j’en fasse la musique. Et c’était « Matka Edeniin » (A Journey to Eden) qu’on a fait quelques années après… trois ans après, je crois. Voilà. C’est lui qui voulait absolument travailler avec moi. C’était une grosse surprise, je dois dire.

Pour ce qui est du dernier volet de cette trilogie, quel en était, cette fois, le fil directeur ?
P. G. : L’idée de base de la musique, c’étaient des chansons sur des textes de Rainer Maria Rilke. S’y ajoutait, bien sûr ensuite, la musique additionnelle instrumentale qui est plus « anecdotique » mais la base, c’étaient 8 ou 9 chansons (au départ, 10 chansons) sur un texte de Rilke. J’avais, pour ma part, un gros problème : je ne comprends absolument pas l’allemand. Rilke pour moi, c’était comme du finnois ; je ne comprenais absolument rien. Donc, c’était déjà un pari très difficile car je devais écrire la musique sur les textes en allemand – l’idée étant de garder la langue originale. Et il fallait trouver quelqu’un qui chante parfaitement l’allemand, parce qu’on ne peut pas chanter du Rilke avec un accent. Rax m’a donc envoyé les textes de Rilke. Au départ, ce n’était que des textes de Rilke mais ensuite, au cours de l’évolution du film, il m’a dit qu’il y avait certains textes qui ne correspondaient pas exactement à ce qu’il voulait dire. Il a donc lui-même écrit quatre des textes des chansons. Il m’a fallu alors trouver une chanteuse. Mon idée, c’était tout de suite mezzo-soprano. Cela tombait très bien car je connaissais Itziar Lesaka. Nous avions précédemment travaillé ensemble et je savais qu’elle se produisait en Allemagne, qu’elle était familière de l’opéra allemand. Donc, j’ai fait tout de suite la connexion. C’était la personne idéale. Il y a eu aussi l’idée que la musique devait être assez moderne, assez expressive, mais tout de même pas une musique de film classique… c’était quelque chose de plus aventureux.

Itziar Lesaka, puisqu’on a le plaisir et la chance de vous avoir avec nous, vous pourriez peut-être nous dire comment vous avez accepté ? Quelles ont été vos premières impressions ? Est-ce que d’emblée cela vous a semblé facile de chanter sur des textes de Rilke ?
Itziar Lesaka : Rilke, c’est toujours très dense. On lit et relit les textes, et on découvre toujours d’autres dimensions. C’est comme une lecture qu’on ne finit jamais. Puis, il y avait la musique de Pascal, et on a discuté de la manière dont il voulait que je chante, s’il souhaitait que ce soit plus ou moins dramatique…
Vous avez, en quelque sorte, essayé de vous adapter l’un à l’autre.
P. G. : Absolument. Mais, en même temps, l’avantage des musiciens c’est qu’on a un système d’écriture qui est assez déterministe. Donc, une fois que j’ai écrit la musique, que cette musique est complètement écrite, après c’est un problème d’interprétation. Par ailleurs, j’ai aussi envoyé les textes à Itziar et elle me les a lus en allemand pour que j’aie la rythmique, la sonorité. Ensuite, j’ai dû savoir, mot à mot, ce que ça signifiait pour avoir un sens général, pour ne pas faire d’erreur. Finalement, sur ce que j’ai écrit, elle-même a fait des corrections rythmiques. Donc, cela a été une véritable collaboration.

Comment procédez-vous pour composer la musique d’un film ? Le réalisateur vous laisse-t-il, en général, toute liberté ? Est-ce avec chaque réalisateur différent ou bien appliquez-vous toujours les mêmes méthodes ?
P. G. : Cela fait beaucoup de questions. Mais je dirais que c’est très différent suivant le réalisateur. En fait, chaque projet est complètement autonome et a une philosophie particulière. Il faut arriver à comprendre ce que le réalisateur a dans la tête. C’est le plus important, le reste est un peu anecdotique. Maintenant, si c’est quelqu’un que je connais, avec qui j’ai déjà travaillé, dont je connais un peu l’univers, je suis capable de travailler sur le scénario avant de voir les images mais, en général, je préfère travailler à partir des images puisque c’est vraiment ce qui me donne le rythme, la couleur. Donc, pour moi, c’est le plus important. Après, dans la manière de travailler, de plus en plus les montages sont faits avec des musiques de référence ; c’est-à-dire qu’on nous colle des musiques d’autres films ou bien des musiques qui n’ont rien à voir, et c’est très problématique au niveau de la création parce que ça induit à une couleur mais, d’un autre côté ça aide le réalisateur et le monteur du film à donner un certain sens rythmique à des séquences. Je dirais, donc, que c’est un peu à double tranchant. Chaque film est un projet différent, il faut commencer la page blanche et on se demande comment ça va se passer. Et puis, aussi, le fait de faire des films très différents fait qu’on compose des musiques relativement différentes : cela peut être des musiques symphoniques, des musiques de chansons, comme de la musique contemporaine ou de la musique plus ethnique. Donc, il faut avoir une palette assez large de possibilités pour pouvoir s’adapter à la situation. Pour moi, le plus important c’est ce que veut dire le réalisateur. Ce n’est pas la musique, car la musique est un élément ; en revanche, la globalité du film, c’est vraiment la chose la plus importante. Mais, dans le cas de Rax, par exemple, il me laisse totale liberté. Il me détermine un peu le cadre général et, après, il me laisse libre de composer un peu ce que je veux. Je lui propose des choses, et lui-même, par la suite, avec la musique une fois enregistrée, refait une sorte de montage et retravaille certaines séquences.

Diriez-vous que la musique de ce dernier volet de la trilogie a été plus difficile à composer que celle des deux films précédents et, dans ce cas, quelles en étaient les difficultés ?
P. G. : Il y a des côtés positifs dans le fait que l’on ait déjà travaillé ensemble avec Rax ; ça apporte beaucoup d’éléments de compréhension entre nous. Je connais un peu son univers et, par conséquent, je sais un peu où ça va, je comprends un peu ce qu’il veut dire dans la musique. Après, la difficulté précisément dans ce dernier volet de la trilogie « Luciferin viimeinen elämä », c’était surtout le fait de travailler sur des textes en allemand, des textes de Rilke, de faire une musique spécifique qui soit de la musique pratiquement de concert – c’est, en effet, une série de pièces qu’on pourrait absolument donner en concert, une forme hors film. Donc, ça, c’était un peu le pari. Sinon, c’étaient des problèmes musicaux purs et durs.

Est-ce qu’il vous est arrivé, malgré toute votre expérience et les nombreux prix attribués, que vous ne réussissiez pas à adapter une musique à un film et que vous deviez renoncer ?
P. G. : Des difficultés, il y en a toujours mais ce sont surtout des problèmes de compréhension. Parfois, le réalisateur veut aller dans un sens, vous dit comment doit être la musique, et l’intuition du musicien – surtout que maintenant j’ai un peu d’expérience – me dit que non, me dit que je ne suis pas tout à fait d’accord. Donc, ça peut se discuter. A vrai dire, ça ne m’est jamais arrivé de refuser sauf une fois, en plein travail, pour un film d’Eduardo Chapero Jackson intitulé « Verbo » où j’avais fait vraiment beaucoup de maquettes. Cela faisait des mois et des mois que je travaillais et on n’arrivait pas à trouver un accord. Je lui ai donc dit que je ne pouvais pas continuer et qu’il devait trouver un autre compositeur. Mais, pour lui, c’était hors de question ; il voulait absolument travailler avec moi mais, pour cela, il nous fallait trouver la clé. On a travaillé neuf mois, ce qui est absolument anormal. En général, pour un film, on travaille trois mois maximum. On a travaillé 9 mois, et je crois que j’ai dû écrire 5 ou 6 heures de musique en tout pour un film qui en contenait 40 minutes. On n’arrivait pas à trouver la clé ; je ne comprenais pas ce qu’il voulait et, pourtant, on avait déjà travaillé ensemble. Mais c’était un film très spécial. C’est la seule fois où j’ai failli refuser de travailler, sinon c’est quand même rare. En général, les gens qui m’appellent veulent travailler avec moi, donc ils savent à peu près ce que je peux faire ou ils savent un peu vers quoi on va se diriger.

Quel est, selon vous, le rôle de la musique dans un film ? Quels sont les critères les plus importants dans la réalisation d’une musique de film ?
P. G. : Encore une fois, cela dépend du film, un peu du genre du film, si c’est une comédie légère ou un thriller. A mon avis, la musique doit apporter les éléments que l’image ne donne pas ou que l’action dramatique ne donne pas. La musique doit être une voix supplémentaire. Mais après, entre le discours théorique et la pratique, c’est très différent. Moi, je suis devenu très pragmatique, c’est-à-dire qu’en fait j’essaie beaucoup de choses. Et puis, certaines fonctionnent au niveau intuitif et d’autres non. La musique ne peut pas être autonome, elle doit être complètement intégrée dans le film, et ça c’est vraiment ce qui est, à mon avis, le plus important. Donc, il faut trouver cette chose qui fait que, tout d’un coup, une musique est vraiment écrite pour ce film. Elle ne peut être que pour ce film, et c’est là où ça fonctionne. L’alchimie se produit ; il se passe quelque chose de nouveau. Il suffit de voir la séquence sans la musique et avec la musique. Tout d’un coup, il se passe quelque chose de différent. Ce n’est pas de la musique qui accompagne. Moi, je n’aime pas trop la musique illustrative même si, de temps en temps, cela peut être intéressant. La musique apporte quelque chose que l’image ne donne pas et, à ce moment-là, il se passe quelque chose d’une autre dimension. Et là, ça devient intéressant ; cela devient créatif et productif.

Comment vous vient l’inspiration ? Est-ce un long processus ?
P. G. : Je n’ai pas de problème d’inspiration. En fait, je passe beaucoup de temps à ne rien faire. A partir du moment où je travaille sur un projet, je passe un certain temps à réfléchir sans rien faire. Souvent, les gens me demandent ce que je suis en train de faire et je leur réponds, alors que je suis tranquillement assis dans un fauteuil, que je suis en train de travailler – ce qui choque beaucoup de monde ! Ensuite, quand j’ai à peu près défini l’axe que je vais essayer de travailler, je me mets au travail musical. Alors, à ce moment-là, je peux aussi bien travailler à partir d’improvisations, d’idées que j’ai déjà pensées mais, disons, qu’en général je n’ai pas trop de problèmes d’inspiration. Je me mets au travail et ça vient. Alors après, cela peut donner, bien sûr, des choses intéressantes comme des choses moins intéressantes. Il faut accepter parfois de perdre du temps d’un côté pour en gagner de l’autre. C’est un peu l’idée.

Bien que vous soyez français, ou du moins né en France, vous vivez et travaillez essentiellement en Espagne. Est-ce un choix délibéré ou bien des opportunités, disons, géographiques ?
P. G. : Oui, j’ai passé une partie de ma vie en France, et je suis toujours français. Ensuite, l’histoire a fait que j’ai commencé à travailler avec des chanteurs au Pays basque parce que je vivais à Bayonne. Puis, petit à petit, le hasard a fait que je me suis retrouvé à faire des films. C’était un monde que je ne connaissais pas bien et auquel je n’imaginais pas participer un jour. La composition m’intéressait beaucoup, mais le cinéma… En fait, un jour, on m’a demandé, à travers des amis qui faisaient un film, si je ne pouvais pas en faire la musique, et j’ai accepté. De fil en aiguille, cela m’a enchaîné au cinéma espagnol surtout, puisque la majorité des films que j’ai faits sont espagnols, basques ; j’ai fait un film en France, quelques-uns en Amérique du Sud, et un à Cuba… enfin, c’est un peu ma zone géographique. Et, maintenant, en Finlande avec Rax. Mais ce sont les circonstances. Comme la majorité des musiciens de films – et j’en connais pas mal –, pratiquement tous sont des gens qui n’avaient jamais pensé faire du cinéma. Il y en a très, très peu qui ont dit qu’ils voudraient faire un jour de la musique de film. Ce sont des compositeurs qui, par hasard, sont venus à l’image.

Depuis près de trente ans, vous avez fait un nombre incalculable de musiques de films (documentaires, courts et longs métrages), cela vous laisse-t-il assez de temps pour composer des oeuvres de concert ?
P. G. : Cela ne me laisse pas beaucoup de temps, mais c’est une activité indispensable à l’équilibre mental. Dans le cinéma, on travaille toujours pour le projet de quelqu’un d’autre, pour une équipe. Même si c’est un projet collectif, donc très intéressant, cela restreint quand même un peu la liberté. En ce qui me concerne, j’ai besoin d’écrire de la musique de concert. Je n’ai aucune pression financière, pas de problème de public ; c’est simplement un espace de liberté pour moi. Donc, c’est vital. Pendant quelques années, j’ai arrêté de le faire et j’ai senti en moi la nécessité d’équilibrer. L’idéal, c’est un peu, comme dans le film de Rax, de regrouper de la musique quasiment de concert avec de la musique de film. Pour moi, c’est fabuleux. Et c’est assez unique. En effet, c’est très rare de pouvoir faire ça dans le cinéma, c’est-à-dire de pouvoir composer de la musique qui pourrait être jouée en concert. Mais j’ai quand même besoin de travailler sur des zones plus de musiques de concert où je suis en totale liberté. J’écris surtout pour des petits ensembles ou des interprètes solistes. Si vous écrivez pour orchestre, par exemple, et si après ce n’est pas joué, c’est un peu frustrant. A ce moment-là, il vaut mieux attendre une commande d’un ensemble important. Par contre, pour les solistes, c’est beaucoup plus facile de trouver des gens qui travaillent beaucoup, et on écrit pour eux… pour un duo, un trio, un quartet. C’est un peu mon idée. Et ces gens-là jouent partout. En général, ce sont des interprètes qui se produisent partout en Europe, au Japon et aux Etats-Unis.

Vous avez enseigné vers la fin des années 80 à Toulouse la musique acousmatique – proche de la musique électroacoustique. Vers quelle musique va votre préférence : la musique contemporaine, électronique, classique moderne ?
P.G. : La musique acousmatique, c’est la musique électroacoustique. Il y a un certain François Bayle qui a défini le terme acousmatique qui veut dire qu’on ne voit pas la fabrication du son, ce qui était, du reste, l’enseignement de Pythagore qui enseignait derrière un rideau pour que ses élèves ne soient pas perturbés par le personnage et se concentrent davantage sur son discours. Donc, la musique acousmatique/acousma, ça vient de là. C’est, en effet, une partie de ma formation, c’est ce que j’ai fait au Conservatoire national de Toulouse. Ensuite, un peu naturellement, on m’a proposé à l’université de devenir professeur-assistant. Et c’est quelque chose que j’ai pratiqué très longtemps. Mais maintenant, avec le recul, j’ai pris un peu de distance avec ça parce que je trouvais que la tendance de la musique électronique devenait un peu sectaire, c’est-à-dire que ça s’adressait de plus en plus à un public très réduit, un peu comme avec la musique contemporaine à une certaine époque. J’ai d’autant pris mes distances que, dans la musique électronique, on dépend énormément du matériel, de l’évolution de la partie technique. Il est arrivé un moment où on ne pouvait pas rejouer les musiques parce qu’on n’avait plus les mêmes appareils. Et ça, pour moi, c’était un peu problématique. Donc, c’est quelque chose que je n’écarte pas totalement, mais que j’ai un peu abandonné pour l’instant. Je préfère m’axer maintenant sur la pure musique instrumentale, vocale instrumentale. La musique instrumentale pour moi, c’est ce que je pratique le plus. Et l’électronique me sert pour le cinéma, par exemple, puisque la musique est enregistrée, la musique est un support ; on peut donc mélanger de l’orchestre avec de l’électronique, avec tout ce qu’on a sous la main. Je ne suis pas sectaire. C’est contemporain, mais je peux écrire aussi des choses très mélodiques, très simples, des chansons aussi. J’ai beaucoup travaillé avec des chanteurs, des auteurs-compositeurs. J’adore également la musique ethnique. Je suis vraiment très ouvert, je n’ai aucun problème.

Quels sont vos projets actuels ?
P. G. : Le projet de film de Carlos Saura, « Guernica, 33 días » (Guernica, 33 jours), est un peu mystérieux puisque le tournage a été retardé d’un an et, en principe, ça devrait se tourner en début d’année prochaine – du moins c’est ce que m’a dit la production il n’y a pas très longtemps. Or d’autres personnes m’ont dit que le tournage ne pouvait pas encore commencer parce que les acteurs – Antonio Banderas et Gwyneth Paltrow – n’étaient pas disponibles. Donc, c’est un peu un mystère. J’ai rencontré Saura et on a discuté. J’ai lu le scénario, je sais que le financement du projet est fait et, donc, il ne resterait plus qu’à faire la musique.
Mais, pour l’heure, je suis en train de travailler sur un film de deux réalisateurs basques, Jon Garaño et José María Goenaga. Ils ont réalisé un film en 2010 « 80 jours » qui a remporté un certain succès, surtout en France, et maintenant je travaille sur leur nouveau film. J’ai commencé il y a une semaine, et c’est un film qui s’intitule « Les fleurs du jeudi ». Enfin, le titre peut changer encore. Mais le film est fait. Moi, j’ai une version définitive, avec sous-titres, etc. Il ne reste plus que la musique à faire. Je ne vais que très rarement sur un tournage. Les rares fois où j’y suis allé, j’ai trouvé ça, personnellement, très ennuyeux ; on attend beaucoup. Par contre, c’est intéressant dans la mesure où cela permet de rencontrer les acteurs. Car très souvent, nous, les musiciens ne connaissons que le réalisateur, le monteur, le preneur de son et le producteur. On ne connaît pas les acteurs, on ne connaît personne d’autre. Donc, si je peux aller au tournage ne serait-ce que pour sentir un peu ce qui se passe, c’est intéressant. Par contre, je ne suis pas un tournage pendant des mois. Je travaille à partir du premier montage ; parfois, ils m’envoient des rushs ou des séquences, quelque chose pour avoir un peu une idée.

Pour conclure, que diriez-vous, Itziar Lesaka, de cette expérience cinématographique dans le film de Rax Rinnekangas… et de vos projets ?
I. L. : C’est la première fois que je travaille sur un film. Pour moi, cela a été une aventure. Et, en rapport avec la dernière question, je dirais que, pour ce qui me concerne, quand j’ai reçu les partitions, je voulais voir le film, je voulais voir les acteurs… il me fallait voir quelque chose. Je savais qu’à ce stade-là ce n’était pas possible, que je devais seulement chanter mais, malgré tout, pour me donner de l’inspiration, de l’émotion et voir comment interpréter, j’avais besoin d’images. Je travaille le plus souvent à l’opéra (15 ans de scène, actuellement à l’opéra de Schwerin, en Allemagne – N.D.L.R.) et je suis toujours sur scène (30 à 50 représentations par an – N.D.L.R.) Je suis donc toujours entourée d’images et je joue. Je dois dire que cela a été et reste une très belle aventure. Je vais également chanter dans le nouveau film de Rax, actuellement en préparation. J’en connais maintenant les acteurs ; je connais aussi un peu l’histoire, et je pense que pour moi cela va être, cette fois-ci, plus facile.

Un projet commun peut-être ?
P. G. : Très prochainement, on va travailler ensemble avec Itziar. On va, en effet, enregistrer en février une pièce de musique contemporaine où chante Itziar, et Marianne Leclerc (harpiste dans « Luciferin viimeinen elämä » – N.D.L.R.) va jouer de la harpe avec d’autres instrumentistes. Je suis en train de préparer un disque de ma musique de chambre et musique de concert et, dans ce cadre-là, on va enregistrer une pièce avec Itziar.

Propos recueillis par Aline Vannier-Sihvola
à Helsinki, le 28 octobre 2013